Guinée : trois jours de violences post électorales

La Guinée vient de connaitre cette semaine trois jours de violences qui ont fait au moins 7 morts après la proclamation des résultats d'une élection présidentielle qui maintient le pays dans une grande tension depuis des mois. Après un 1er tour contesté le 27 juin, le deuxième tour de la présidentielle – qui devait se tenir initialement le 19 septembre mais a été repoussé – a finalement porté au pouvoir le 7 novembre dernier l’opposant historique Alpha Condé (RPG) avec 52, 52% des suffrages contre 47,48% à Cellou D. Diallo (UFDG).

Image du site de campagne de Alpha Condé

Ce n'est pas ce que laissait présager les résultats du premier tour, que nous pouvons lire sur Lejourguinée :

Cellou Dalein Diallo et Alpha Condé [étaient] accrédités respectivement de 43,69% et 18,25% des voix à l'issue du premier tour tenu le 27 juin.

Alors, comme le disent les partisans de Cellou Dalein Diallo toutes les autres ethnies du pays auraient-elles voté contre lui parce qu'il est Peul, et candidat de l'ethnie majoritaire (35 %) du pays ?

Affiche électorale de Cellou Dalein Diallo

Le 17 novembre, le site Guinée Libre , pro-Diallo, mettait en cause :

… le nettoyage ethnique dirigé contre les peuls dans les préfectures de Siguiri et de Kouroussa qui a empêché ces derniers de participer au vote dans ces régions.

La victoire de Alpha Condé n'était pas non plus, sous-entendait le blog Survie dès le 10 septembre, le souhait de la Françafrique entre les deux tours :

Nous sommes heureux d’apprendre que Claude Guéant, le secrétaire général de l’Elysée, a un favori pour l’élection présidentielle guinéenne. Ex-cadre de la Banque centrale et ancien Premier ministre sous Lansana Conté (décembre 2004-avril 2006), Cellou Dalein Diallo lui a été présenté par Robert Bourgi et il s’est déjà entretenu une dizaine de fois avec lui (selon Jeune Afrique du 1er août 2010).

La Guinée aurait alors par le choix de Alpha Condé, encore une fois dit « non » à l’influence de l'ancienne puissance coloniale comme en 1958. Mais cela ne se passerait pas mieux, comme le montre les violences qui ont suivi la proclamation des résultats. Le mardi 16 novembre, Africaguinée.com déplorait :

Violences en Guinée: 2 nouveaux morts …

Le lendemain, 17 novembre, Africaguinée.com  informait qu’un couvre-feu avait été instauré par le premier ministre par intérim dans le fief de Cellou Dalein Diallo pour tenter de reprendre le contrôle de la situation :

Jean-Marie Doré impose le couvre feu dans plusieurs villes du Foutah…

Le calme ne revenant pas, le 18, le site Net-A-Li faisait état de mesures nationales :

Le général Sékouba Konaté a instauré mercredi, l’état d’urgence en Guinée, jusqu’à la proclamation des résultats définitifs de l’élection présidentielle. Les affrontements postélectoraux ont installé l’insécurité dans le pays, faisant ainsi 7 morts en trois jours. Cette décision du président Konaté vise à éviter de nouvelles violences dans le pays. Et elle fait suite à celle du premier ministre Jean Marie Doré qui a décrété mardi soir, un couvre-feu.

On peut noter que beaucoup ont appelé au calme par l’intermédiaire des blogs,  et une intervention du Président du Sénégal, signalée par le site d'informations Seneweb :

Wade s’est entretenu avec Alpha, Cellou et Jean Marie Doré pour ’’une issue rapide à la crise’’

Sont également otages de la situation les journalistes guinéens. Sur le site de Radio-Kakan on pouvait lire :

… a le regret d’informer la population guinéenne que plusieurs de ses membres ont été inquiétés par des groupes d’individus qui ont menacés leurs journalistes, molestés et blessés certains d’entre eux, et cherchés à détruire leurs installations.

La plupart des radios sont passées au service minimum, car les journalistes et les animateurs ne peuvent se déplacer librement de peur d’être attaqués.

Jeudi 18 au soir, alors que le pays venait de connaître trois jours de violence, Aminata.com saluait un mieux :

Crise postélectorale: Le calme revient peu à peu!

C'est sur de rares comptes Twitter que l'on trouve des informations sur la situation heure par heure dans la capitale. Au soir du jeudi 18 novembre, @willoxh faisait aussi état d'un retour progressif au calme :

Kaporo: Bon, 18h23… ça commence à tirer (pour faire rentrer les gens chez eux) #guinee

Conakry: Lycée Albert Camus – Reprise des cours le 22/11 (sauf contre ordre) #guinee

Conakry: Air France reprogramme ses vols dès demain, avec des arrivées à Conakry prévues les samedi, lundi, mardi et jeudi à 07h30 #guinee

Le vendredi 19 au soir, il remarquait que le couvre-feu était respecté  :

Kaporo: pas un seul tir depuis 18h00 (début du couvre feu) :o))

4 commentaires

  • Les 7 morts sont ceux dont les corps ont été transportés à la morgue de l’hôpital national Donka. Il y a en a eu d’autres dans différentes villes de l’intérieur, en particulier au Fouta, habitée principalement par les peulhs région d’origine du candidat perdant. Des biens ont été saccagés et les militants peulhs ou d’autres ethnies des partis qui ont rejoint le vainqueur après le premier tour ont été harcelés.

    Je voudrais vous signaler qu’il y a des jeunes peulhs qui ont été arrêtés depuis lundi et ils sont toujours en prison. C’est le cas de Thierno Youssouf Diallo, un enfant de 16 ans, un adolescent de16 ans que des militaires ont prélevé en cassant la porte de la maison où il habite avec sa maman. Ses autres frères sont cachés chez moi à Ratoma. C’est sa soeur qui lui apporte à manger et paie un des gardiens pour lui donner la nourriture. Elle n’a même pas le droit de le rencontrer. Il a été amené avec les autres à la prison de la Sureté de Conakry. Il parait que le gosse a été transféré aujourd’hui à la Prison des mineurs.

    A la Sureté, ils sont tellement nombreux que par manque de place certains d’entre eux dorment dans les toilettes. Sa seule faute, comme probablement la plupart des autres, est d’être peulh. La plupart ont été raflés dans les familles, en brisant les portes des maisons pour les arrêter sans mandat.

    Le neveu d’un ami, à Conakry, a lui aussi a été arrêté. Il se trouvait dans son salon et dans ce cas aussi c’était des militaires sans mandat qui ont brisé la porte de la maison, pour se saisir de lui et le jeter dans un camion pour l’emmener directement à la prison de la Cimenterie. Il n’a été libéré qu’après paiement d’une rançon.

    Tueries, rafles collectives, emprisonnement et conflits entre les ethnies, voici comment commence la nouvelle ère en Guinée. Après nous et nos parents ce sont nos enfants qui sont les nouvelles victimes de l’état guinéen. Pourtant les nouveaux maitres du pays devraient savoir qu’un état ne se construit pas sur la haine.

  • […] traverse une période difficile. Les élections législatives n’ont pu se tenir après les dernières élections présidentielles. Et il y a depuis plusieurs semaines des manifestations de […]

  • […] traverse une période difficile. Les élections législatives n’ont pu se tenir après les dernières élections présidentielles. Et il y a depuis plusieurs semaines des manifestations de […]

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