Portrait d'une traductrice : Adriana Gutiérrez

Le groupe linguistique hispanophone de traducteurs de Global Voices est le plus nombreux de toutes les équipes du projet Lingua, pourtant on connait très peu de choses sur les personnes qui le composent. “Je devrais donc faire mon mea culpa”, écrit le responsable de l'équipe,” en admettant ma responsabilité et naturellement en cherchant à remédier à cette situation. Je vous présente, donc, une de nos principales collaboratrices avec plus de 1800 billets traduits. J'ai eu l'opportunité de la rencontrer en personne, comme plusieurs autres membres de GV, à Santiago lors du Sommet de cette année [2010], et comme on peut le comprendre, lorsque nous nous sommes rencontrés, la première fois, nous nous sommes traités comme des amis de longue date. Pour ceux qui n'ont pas eu ce privilège, voici Adriana Gutiérrez” [liens en espagnol]:

Adriana Gutiérrez

Salut Adriana, on dit qu'un bon traducteur doit se faire remarquer le moins possible, mais nous voudrions vraiment te connaitre un peu plus.

Eh bien, je suis vénézuelienne de naissance et de culture. Depuis 10 ans, je suis graphiste, indépendante pour ma part, mariée à un autre graphiste depuis 18 mois et amoureuse de mon chien et amatrice de musique, d'internet et de cinéma… dans l'ordre. J'aime aussi la lecture, surtout de romans de high fantasy, de suspense et de réalisme magique (ce dernier genre m'a toujours semblé très caractéristique de l'Amérique latine ). J'ai peu d'amis, peut-être parce que je suis timide ou bien parce que je suis distante (ou les deux), mais ne vous trompez pas sur les apparences, il n'y a rien de “sérieux” en ce qui me concerne.

Parle-nous de ton expérience comme graphiste

Comme graphiste, j'ai travaillé étroitement avec le monde de la publicité. Depuis que je me suis diplômée j'ai eu beaucoup de travail, heureusement, et le plus souvent dans des agences de publicité dans la ville où je vis, même si ces boulots m'ennuyaient (ils sont cycliques et toutes les agences travaillent de la même manière). Cependant, depuis un an, mon mari et moi avons décidé de prendre le risque de créer notre propre agence de graphisme, même si ça s'est révélé un peu difficile au début (comme tout début), nous avons aussi eu beaucoup de travail comme graphistes indépendants. Consultez notre  page Facebook vous verrez quelques uns de nos travaux …mais ne soyez pas trop cruels par vos critiques, hahaha.

Et qu'en est-il de ton blog et de tes autres activités en ligne ?

Mon blog est Bitácora Invisible [es] (Blog Invisible ) (depuis 2005); c'est mon espace personnel dans lequel il y a un peu de tout (littéralement), des anecdotes, des opinions, des photographies, principalement en espagnol. Cet espace a été en sommeil pendant quelques années, par coïncidence lorsque mes comptes Twitter (@Adri021) et Tumblr ont commencé à croitre…. mais depuis peu j'ai repris l'habitude d'y écrire et j'ai déjà publié  de nouveaux billets. J'ai un podcast sur les bandes musicales de films, en espagnol aussi, mais à cause de mon travail, cette activité s'est arrêtée au 28ème épisode et le 29ème est parmi mes tâches à porter à terme. Il y a aussi ma galerie sur Flickr, qui est aussi variée que mon blog. Ah! Quelques fois, je collabore aussi avec des amis qui s'intéressent de plus en plus à la production de vidéos virales et il y a quelques vidéos sur YouTube comme El Jefe se entera… [“Le boss découvre……”, une parodie de la fameuse vidéo de la scène de colère de Hitler dans “La Chute” – il se rend compte de l'utilité d'Internet pour le métier de publicitaire et CollowFriday [une parodie des vidéos FollowFriday sur Twitter, en espagnol].

Etant graphiste, d'où te vient-il cet intérêt pour la traduction ?

J'aime les langues depuis que j'étais enfant ; quand je suivais les cours d'anglais, j'aimais traduire des textes (courts) ou des chansons pour apprendre plus et j'ai augmenté progressivement la longueur des textes. Ensuite, en découvrant les blogs, quelques fois j'avais envie de partager mes lectures, mais je savais que tous mes contacts ne comprenaient pas l'anglais, j'ai alors traduit les articles … j'ai ensuite commencé à traduire pour GV … le reste c'est l'histoire.

Veux-tu partager cette histoire avec nos lecteurs?

Sûrement. Depuis que j'ai commencé mon blog j'ai été fascinée par le pouvoir de la communication et des médias, par la suite en 2007, j'ai découvert Global Voices online grâce à Luis Carlos Diaz, qui y travaillait comme auteur et traducteur pour la version espagnole. Il transmettait une invitation du rédacteur en chef pour trouver des traducteurs volontaires auquel j'ai répondu, attirée par l'idée de prendre part à ce recueil d'articles locaux pour une plus grande audience. Depuis lors je n'ai plus arrêté de travailler avec ce projet, je pourrais avoir réduit un peu la fréquence, mais en réalité mon intérêt pour GVO/Lingua n'a pas diminué d'un millimètre … Je pense que comme l'a dit Leonard (Chien), la relation entre Lingua et ses traducteurs est une histoire d'amour. Les sujets que je traduis ont toujours été variés, cependant je suis intéressée par les articles sur l'environnement, la culture et le cyber-activisme, je préfère donner une certaine diversité à mon “horizon” et m'intéresser à différents types d'articles aux lecteurs de GV en espagnol.

Tu as traduit pour GV depuis plus de trois ans, que conseillerais-tu à ceux qui viennent de commencer?

Question difficile, voyons … Je parlerai d'après ma propre expérience, pour mieux illustrer à quoi ressemble travailler avec GV (et à quoi cela pourrait ressembler pour des débutants) : pour moi, GV/Lingua a signifié avoir le monde de plus près, et je ne ne l'entends pas de manière physique mais comme me sentir proche des gens, en apprenant les réalités de différents endroits en même temps, racontées par les principaux acteurs eux-mêmes, sans “maquillage” ou autres intérêts pour décrire ce qu'ils vivent et ressentent. Au début, j'ai adopté une approche “égoïste”: Qu'est ce que j'aurais voulu lire sur un site comme GV ? et c'est de ce point de vue que je choisissais les billets et chacune de ces traductions me poussait à chercher à savoir encore davantage sur ces histoires, comme je disais, des réalités d'autres endroits … en sachant bien que mon intérêt personnel à apprendre plus aiderait certaines histoires à atteindre une plus grande audience, était une valeur ajoutée supplémentaire. Jusqu'à maintenant, je ne considère pas GV comme une obligation, c'est difficile de le considérer ainsi, alors que je peux y consacrer le temps que je choisis, sans aucune limitation  ni aucun programme et avec un groupe de collègues prêts à contribuer davantage au travail des autres.

Adriana Gutiérrez

Le Venezuela est devenu un peu un pays “compliqué”, comment le vois-tu de l'intérieur?

Plus compliqué (parce que je vis ici).  De mon point de vue une division sociale et idéologique très négative s'est développée au Venezuela, et elle empêche largement d'atteindre des points d'accords pour la majorité, ce qui a poussé les citoyens à devenir réactionnaires et même violents. Il y a aussi le manque d'organisation et d'équilibre dans l'administration actuelle, très souvent il n'y a pas de consistance entre ce qui est dit (qui parait en théorie positif) et ce qui est fait. En offrant des opportunités pour l'avancement et la croissance de ceux qui, historiquement n'en ont pas eues (ce qui est bon), mais en le faisant d'une manière compliquée et peu transparente, ce qui rend les résultats à la fin insuffisants et même nocifs pour la plupart … en répétant les erreurs des administrations précédentes, qu'ils critiquent. Le Venezuela reste un beau pays avec une population qui cherche à faire les choses convenablement, c'est juste que nous traversons un moment délicat.

Parle-nous de la ville où tu vis.

Barquisimeto est une ville brumeuse (c'est pourquoi il y a tant d'arc-en-ciel sur mon compte Flickr), une ville qui a su jusqu'à présent garder l'équilibre entre béton et nature. Elle est connue au Venezuela comme la “ville de la musique” à cause des nombreux musiciens de talent qui en proviennent (l'exemple le plus récent et le plus connu est Gustavo Dudamel, Directeur de l'orchestre Philharmonique de Los Angeles) … en réalité une des meilleures académies du Système d'orchestres d'enfants et de jeunes du Venezuela, renommée et prise en exemple à travers le monde entier se trouve à Barquisimeto. S'il y a quelque chose qui caractérise cette ville, c'est que bien que beaucoup d'entre nous ne sont pas nés ici (moi, je suis née à Meirda, une ville qui se trouve dans les Andes du Venezuela et nombreux parmi mes amis viennent d'autres villes aussi), nous nous sentons “guaros”* comme tous ceux qui sont nés dans cet endroit. (*) Au Venezuela, on appelle “guaro” ceux qui sont nés ou vivent dans l'état de Lara, dont la capitale est Barquisimeto.

Que pourrais-tu nous décrire de Barquisimeto qui soit particulièrement attractif ou que tu aimes ?

Bien que de nombreuses personnes se plaignent qu'il n'y ait rien à faire dans  cette ville, moi je pense que c'est une accusation sans fondement. La ville de Barquisimeto et ses environs possèdent tout : vie nocturne, expositions et spectacles culturels ininterrompus, nombreux restaurants (la cuisine traditionnelle de El Roble est spéciale), des parcs et des endroits où faire des excursions…. mon endroit favori est La Flor de Venezuela [es], un pavillon conçu par l'architecte Fruto Vivas pour représenter le Venezuela à l'exposition universelle de Hanovre 2000, qui associe architecture, flore et faune ainsi que des informations culturelles sur le pays ; et il s'y trouve même un petit restaurant avec de délicieuses crêpes. Il y a aussi la ville de Santa Rosa, dont l'église abrite les restes du saint patron de la région, la Divina Pastora, un musée d'histoire, un point d'observation d'où on peut voir Cabudare (la ville jumelle de Barquisimeto) et certains autres de mes endroits favoris: une pâtisserie qui a des desserts délicieux où on vous permet de dessiner sur le papier des nappes pendant qu'on attend sa commande.

Enfin comment décririez-vous le Venezuela à un étranger?

Le Venezuela est un pays  de contrastes, avec des endroits très froids ou très chauds (avec tout ce qu'il y a au milieu), une richesse et une pauvreté extrêmes, des paysages idylliques et inoubliables, et malgré ma description de “l'agressivité” de mes compatriotes, il y a des personnes qui peuvent laisser une bonne impression sur nos visiteurs … Je pense qu'il n'y a pas “d'étrangers” ici, parce qu'à partir du moment où vous posez le pied sur le sol du Venezuela (pour une visite ou pour y rester) vous trouverez des gens qui vous traiteront comme “quelqu'un de la famille”.

J'espère en faire l'expérience un jour Adriana, merci pour l'interview.
Merci à toi.

Les autres membres du groupe d'espagnol de Global Voices dans cette section:
Gabriela García-Calderón
La première photo est de l'utilisateur de Flickr  oso reproduite avec une licence CC Attribution-NonCommercial-ShareAlike 2.0 Generic.
Traduit par Adriana Gutiérrez

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