Bras de fer avec le Conseil de l'Europe pour la libération d'un blogueur azerbaïdjanais

Ceci est un article invité de Rebecca Vincent,  Assistante Plaidoyer pour l'Azerbaïdjan, Directrice du Programme Europe à ARTICLE 19. Pour plus d'informations, veuillez contacter Rebecca Vincent : rebecca [ à ] article19 [ point ] org.

Strasbourg 11.04.11 : Inspirée par les soulèvements pour la démocratie au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, une récente vague de contestation en Azerbaïdjan s'est traduite pour une multitude de blogueurs, cyber-activistes, journalistes, militants de la société civile et membres de partis d'opposition par du harcèlement, des arrestations et des brutalités.

Franchissant un pas inquiétant, les autorités azerbaïdjanaises ont ouvert une procédure criminelle contre un cyber-activiste demeurant hors d'Azerbaïdjan. Le Strasbourgeois Elnur Majidli, qui a participé par sa page Facebook à l'organisation des manifestations, répond en ce moment d'accusations d'incitation à la haine.

Alors que la situation du pays en matière de liberté d'expression continue à se détériorer dans le sillage de la répression gouvernementale, des représentants du Groupe de partenariat international pour l'Azerbaïdjan (IPGA) sont déterminés à faire connaître leurs préoccupations pendant la session présente de l'Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) à Strasbourg, du 11 au 15 April 2011.

La situation des droits de l'homme en Azerbaïdjan a atteint un niveau critique. Nous recevons des rapports presque journaliers de violations contre les cyber-activistes, journalistes et autres, en rapport avec l'exerce de leurs droits à la liberté d'expression et de réunion. Ce qui soulève la question : combien d'entre-eux devront-ils encore être arrêtés ou battus avant que le Conseil de l'Europe agisse pour mettre cet Etat-membre devant ses responsabilités ?
La crédibilité du Conseil de l'Europe dépend d'une telle gestion,

a déclaré le Dr Agnès Callamard, Directeur exécutif d'ARTICLE 19.

Au centre des inquiétudes de la délégation d'IPGA il y a la récente vague d'arrestations de blogueurs et militants en rapport avec la contestation, dont certains encourent de longues peines de prison sur la base d'accusations à caractère politique ; la pression accrue sur les organisations non gouvernementales s'occupant de démocratie et de droits humains, dont la fermeture de la Maison des Droits de l'Homme d'Azerbaïdjan;

Le récent enlèvement et passage à tabac de deux journalistes en rapport avec leur critique des autorités ; et l'emprisonnement arbitraire continuel du journaliste Eynulla Fatullayev, qui reste derrière les barreaux malgré un jugement de la Cour Européenne des Droits de l'Homme ordonnant sa libération.

Cette soudaine série d'arrestations de militants et journalistes d'opposition est alarmante. Nous sommes sommes profondément préoccupés par les arrestations qui ont eu lieu avant les manifestations prévues, ce qui laisse entendre que les autorités tentent de faire taire les gens avant même qu'ils commencent à exercer leur droit à la liberté d'expression,

a indiqué Emin Huseynov, Président de l'Institut pour la Liberté et la Sécurité des Reporters à Bakou.

La délégation de l'IPGA demande instamment au Conseil de l'Europe et aux délégations nationales de l'APCE d'accroître sans tarder leur surveillance de la conformité de l'Azerbaïdjan avec ses obligations de membre du Conseil de l'Europe et de tenir l'Azerbaïdjan responsable. La délégation est composée de représentants d'ARTICLE 19, de la Fondation Human Rights House (Maison des Droits de l'Homme), Index on Censorship (La Censure à l'index), et de l'Institut pour la Liberté et la Sécurité des Reporters.

Profil média : Eynulla Fatullayev

Eynulla Fatullayev

20 avril 2007: Fatullayev est déclaré coupable de diffamation et condamné à 2 ans 1/2 d'emprisonnement. L'accusation était fondée sur un article qu'aurait écrit Fatullayev – bien que mis en ligne sur un site internet sous un autre nom – et alléguant que des troupes azerbaïdjanaises auraient pu être complices du massacre de Khojali en 1992.

30 octobre 2007: Fatullayev est déclaré coupable de soutien au terrorisme, incitation à la haine et d'évasion fiscale, et condamné à 8 ans 1/2 d'emprisonnement (peine cumulée avec sa condamnation précédente pour diffamation). Les accusations étaient fondées sur un article qu'il avait écrit, critiquant la politique du gouvernement azerbaïdjani vis à vis des Etats-Unis, arguant qu'elle rendait l'Azerbaïdjan vulnérable à une attaque de l'Iran, et énumérant des sites précis en Azerbaïdjan que l'Iran pourrait attaquer.

29 décembre 2009: Fatullayev est accusé de possession de drogues illégales, après que des gardiens eurent prétendu avoir trouvé 0.22 grammes d'héroïne dans ses vêtements, dans une cellule de haute sécurité.

22 avril 2010: La Cour Européenne des Droits de l'Homme juge que l'emprisonnement de Fatullayev constitue une violation de sa liberté d'expression et de son droit à un procès équitable, et ordonne au gouvernement azerbaïdjanais de libérer immédiatement Fatullayev de prison et de lui verser des dommages et intérêts ainsi que lui rembourser ses frais de justice.

6 juillet 2010: Fatullayev est déclaré coupable de possession  de drogues illégales, et condamné à 2 ans 1/2 d'emprisonnement.

4 octobre 2010: La Chambre plénière de la Cour Européenne des Droits de l'Homme rejette l'appel du gouvernement azerbaïdjanais, rendant définitif le jugement du 22 avril. Le gouvernement azerbaïdjanais est désormais en infraction avec ses obligations selon la Convention Européenne des Droits de l'Homme.

11 novembre 2010: La Cour Suprême d'Azerbaïdjan annule les charges contre Fatullayev de diffamation, soutien au terrorisme et incitation à la haine. Cependant, elle ressuscite aussi une accusation de diffamation de septembre, remplaçant une condamnation avec sursis par une condamnation à la prison ferme, et allonge rétroactivement la peine de prison purgée par Fatullayev pour fraude fiscale. La Cour considère l'accusation de Fatullayev pour possession de drogue comme une affaire distincte.

6 décembre 2010: Le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe émet une décision appelant les autorités azerbaïdjanaises à “explorer toutes les voies possibles” pour mettre fin à la détention de Fatullayev.

28 décembre 2010: La Cour Suprême d'Azerbaïdjan confirme la culpabilité de Fatullayev pour possession de drogue. Les voies d'appel internes sont désormais épuisées.

11 mars 2011: Le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe émet une deuxième décision dans l'affaire Fatullayev, appelant les autorités azerbaïdjanaises à “ôter sans plus de retard tous les obstacles à la mise en oeuvre” du jugement de la Cour Européenne des Droits de l'Homme.

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