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Macédoine : Malgré les menaces, la lutte pour l'énergie équitable continue

Catégories: Europe Centrale et de l'Est, Macédoine, Cyber-activisme, Droit, Droits humains, Economie et entreprises, Liberté d'expression, Manifestations, Média et journalisme, Médias citoyens, Politique

[Liens en anglais ou français sauf mentions contraires] Les participants à l'initiative civile populaire AMAN, qui réclament une réglementation équitable de l'énergie et la fin des hausses de prix administratives en Macédoine, affrontent des pressions de toutes sortes, qui vont jusqu'à des menaces croissantes.

Dans les langues locales, le mot “aman” désigne ‘un cri’ ou ‘une supplique’, il signifie “cessez, par pitié.” Le mouvement populaire contre les hausses de prix par les monopoles publics de services (électricité, combustible [1], chauffage collectif) a commencé ses manifestations hebdomadaires en août [2]. Avec la répercussion de ces hausses sur les prix alimentaires [3], qui affecte au premier rang les plus vulnérables [4], les manifestations ont débordé Skopje et Bitola [5] pour atteindre plusieurs autres villes [6]: Tetovo, Shtip, Prilep, et Kumanovo.

AMAN protest against price hikes in Bitola, Macedonia

Manifestation d'AMAN à Bitola. Photo du blog Energetska efikasnost [7] (Efficacité énergétique) blog, avec permission.

Au début, les autorités, représentées par la Commission de Régulation de l'Energie [8], les médias classiques et les syndicats [9], ont ignoré le mouvement. La réponse d'AMAN a été une communication accrue sur les médias sociaux (le mot-clic #АМАН [10]) et une manifestation devant la Télévision publique, MTV [en macédonien [11] et albanais [12]].

Lorsque le mépris délibéré des autorités s'est trouvé pris en défaut, les participants à AMAN ont été soumis à diverses formes de pressions : infiltration par des agents provocateurs partisans, piratage et panne mystérieuse de leur événement Facebook à répétition, menaces proférées par des passants [13] [en macédonien], stigmatisation par le premier ministre (avec un impact sur la participation des personnes dont les revenus dépendent de l'administration), contre-manifestations [14] des GONGO [15] [NdT : les pseudo-ONG], campagnes de diffamation [16].

One World SEE a écrit [17]:

Depuis le début des manifestations, le gouvernement ne cesse de les accuser d'être menées et fomentées sur instructions du parti en tête de l'opposition, l'Union Social-Démocrate de Macédoine (SDSM [18]).

Le gouvernement a aussi persisté dans sa pratique de répliquer à toutes les initiatives civiques et manifestations contre ses politiques par des contre-manifestations tenues par ses propres organisations et initiatives loyales. Cette fois, on a l'initiative “Brûlé par la Privatisation” („Изгор приватизација“), qui organise des protestations parallèles contre la privatisation de la compagnie d'électricité par la société autrichienne EVN pendant le dernier passage du SDSM au pouvoir.

Le 25 septembre 2012, le Comité Helsinki des Droits Humains [19] en Macédoine a reproché à la Commission de Régulation de l'Energie que ses décisions de supprimer les tarifs bon marché d'électricité quotidienne et d'autoriser la hausse des prix de l'électricité et du chauffage collectif ont été adoptées sur le fondement de dispositions qui n'existent pas en réalité dans le Code de l'Energie.

A la conférence de presse du 30 octobre, les représentants d'AMAN ont informé le public [macédonien : 1 [20], 2 [21], 3 [22]; albanais : 1 [23], 2 [24]] qu'un des membres du mouvement avait reçu des menaces contre lui et sa famille de la part “d'inconnus”, qui l'ont intercepté en plein centre de Skopje, et ont voulu l'interroger sur d'autres militants dont ils lui ont montré les photos. A l'évidence, le message était de stopper les protestations et la pétition en cours pour réformer le Code de l'Energie. Les militants ont demandé à la police et aux autres institutions publiques de retrouver et sanctionner rapidement les auteurs de ces agissements, et au Premier Ministre de ne pas entraver le processus législatif.

http://www.youtube.com/watch?v=dvUqyU9s1dg [25]

La protestation n'en continue [26] pas moins, faisant usage des voies institutionnelles avec la soumission d'une projet de réforme du Code de l'Energie. Sous réserve de l'approbation par le gouvernement, il leur faut ensuite rassembler les 10.000 signatures requises pour proposer des amendements au Parlement.

La pression sur les militants continue, elle aussi. Tandis que les auteurs de la tentative d'intimidation signalée courent toujours, un nouvel incident a émaillé la 12ème manifestation, le 3 novembre. Radio MOF a rapporté [27] [en macédonien] qu'un groupe de contre-manifestants a menacé et essayé de repousser les manifestants d'AMAN, mais la police a empêché toute escalade.

Sonja Ismail, qui participait à la manifestation, a écrit [28] [en macédonien] :

Comme de coutume nous nous sommes rassemblés aujourd'hui à midi devant la Commission de Régulation de l'Energie. Mais nous n'étions pas seuls. Ils sont venus spontanément. Ils ont garé un 4×4 sur le trottoir [à proximité]. Ils sont sortis de 4×4 avec les accessoires spontanément fabriqués de contre-manifestation. [Quelque 50 mètres plus loin] ils ont été rejoints par une soixantaine de plus. Des équipes de cameramen de Kanal 5, Sitel et MTV sont apparues spontanément, elles aussi. Ils ont filmé ces individus qui avaient spontanément mis des masques représentant Radmila Shekerinska [“une parodie” [29] ciblant une députée d'opposition]. Nous étions moins d'une trentaine. Un jeune homme nous a abordés, et à la question de qui il était, il a répondu, de l'Union des Jeunes Forces du [VMRO-DPMNE [30]]. Il nous a donné 20 minutes pour dégager. Il a aussi crié des obscénités en regagnant son groupe. P.S. Il y avait de nombreux policiers présents et ils ont pris la position qui convenait [entre les deux groupes]. Leur supérieur nous a assurés qu'ils étaient venus pour empêcher tout incident violent. Des représentants de l'[OSCE [31]] étaient aussi présents.