Les choix des électeurs israéliens : “Nous ou Eux”, “Tout sauf Bibi” et le reste

Israel elects its next Knesset on March 17, 2015. Pictured: party ballots from 2013. Source: Danny Zelazo on Flickr (CC BY-NC-SA 2.0).

Israël élit sa nouvelle Knesset le 17 mars 2015. Les bulletins de vote des partis en 2013. Source : Danny Zelazo sur Flickr (CC BY-NC-SA 2.0).

A quelques heures de l'ouverture des bureaux de vote ce matin 17 mars 2015 en Israël, pour l'élection de la 20ème Knesset (parlement), les principaux candidats au poste de premier ministre essayaient encore de changer la donne avec leurs annonces. 

Le premier-ministre sortant Benyamin (“Bibi”) Netanyahu déclarait : 

“Je pense que quiconque veut créer aujourd'hui un Etat palestinien et évacuer des territoires donne à l'Islam radical un territoire d'où attaquer l'Etat d'Israël.” Et d'ajouter : “Si [les opposants] Tzipi [Livni] et Buji [Isaac Herzog] montent le prochain gouvernement, le Hamastan 2 s'installera sur ces collines.”

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Autocollant électoral de Netanyahu : “C'est Nous ou Eux. Likoud seulement. Netanyahu seulement”.

L'autocollant de campagne du Likoud de Netanyahu (“Consolidation”) proclame donc logiquement “C'est nous ou eux” (“זה אנחנו או הם”). 

En quelques heures, Tzipi Livni, dirigeante du parti HaTnua (“Mouvement”) et chef de file de la coalition électorale l’Union sioniste, a annoncé abandonner ses projets avec son partenaire Isaac (“Buji”) Herzog en faveur d'une alternance au poste de premier ministre, avec M. Herzog en place les deux premières années et Mme Livni prenant sa suite. Le renoncement à partager le siège visait à éliminer la controverse et gagner les électeurs indécis au moment de la décision finale. 

Sur les médias citoyens, Yair Zivan note que tous les politiciens n'ont pas consacré les dernières heures de la campagne aux synthèses. Il a cité Yair Lapid, tête de liste du Yesh Atid (“Il y a un avenir”), et sa priorité à la communication personnalisée avec les électeurs. 

24 heures avant l'arrêt des sondages et @LapidAtid répond aux questions des électeurs sur sa page Facebook. Plus de 1500 commentaires en 20 minutes

Réagissant aux récents événements, Yair Rosenberg a tweeté :

Ce que j'aime dans les élections israéliennes : contrairement à celles de l'Amérique, il y a toujours la magie de la surprise le jour même, puisque les sondages ne peuvent nous dire qui va gagner.

 Avi Mayer, un des blogueurs israéliens les plus percutants, lui a fait écho : 

A 11 heures de l'ouverture du scrutin ici en Israël, les partis se battent encore pour chaque suffrage. Excitant et épuisant.

Le 8 décembre 2014, la Knesset israélienne a voté la dissolution du gouvernement actuel et l'organisation de nouvelles élections parlementaires. Les partis qui se disputent les suffrages vont de l'extrême-gauche à l'extrême-droite, et d'une liste arabe commune aux religieux conservateurs du Shas. Chaque parti doit atteindre un seuil de 3,25 % des voix — une disposition controversée qui limite la représentation des plus petits partis à la Knesset.  

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Le doodle de Google Israël pour le jour du scrutin lllustre l'urne. (Source: March 17, 2015.)

Cette courte et sympathique vidéo fournit un aperçu complet du processus. Tout citoyen de plus de 18 ans a le droit de vote. Le jour des élections est férié, entreprises et écoles sont fermées, et pour voter il suffit de se présenter à son bureau de vote avec sa carte nationale d'identité. (Si vous avez oublié où vous avez voté la dernière fois, allez sur ce  site web et tapez votre numéro d'identité ; en hébreu). A la différence d'autres pays, aucune inscription préalable n'est requise. Les 11.000 bureaux de vote du pays sont ouverts de 7 à 22 heures. 

Les Israéliens votent en choisissant sur un plateau le bulletin de vote du parti de leur choix, le placent dans une enveloppe, qu'ils collent et introduisent dans une boîte verrouillée. Une commission de contrôle électoral est présente dans la pièce du vote en cas de problème. Une seule personne peut entrer à la fois dans la pièce, et le vote a lieu derrière un paravent ou un rideau pour garantir la confidentialité.

Ceci est la première année où les partis arabes se présentent avec une plate-forme commune. Sous le nom de Liste arabe unifiée, Balad, Hadash, Ta'al et la Liste arabe unifiée se sont mis d'accord pour fusionner leurs programmes afin de s'assurer d'atteindre le seuil électoral, maximiser leur représentation à la Knesset et limiter la capacité du parti Likoud de Netanyahu à former une coalition parlementaire. Ils peuvent espérer récolter 15 sièges au plus. 

Le journaliste de gauche Noam Sheizaf opine :

Scénario de rêve demain : La Liste unifiée remporte 15 sièges et grâce à une participation en hausse, Liberman reste hors de la Knesset

Avigdor Lieberman est le fondateur et chef du parti “ultra-nationaliste” Israel Beytenou (“Notre maison”) et actuel ministre des Affaires étrangères. 

La Campagne V15 (hébreu) (“V” comme victoire) a été constituée avec un programme tout aussi stratégique : chasser Netanyahu, comme le dit son mot d'ordre, “Tout sauf Bibi”. Collaboration de l'Union Sioniste, de la liste arabe, du Meretz (“Energie”) et d'autres partis de gauche, la mise en scène la plus frappante de cette campagne a été l'envoi d'un camion de déménagement au domicile des Netanyahu en février. Selon les mots du militant Hagai Hirschfeld : 

Dans un mois il devra déménager, alors nous sommes venus l'aider. Bibi habite ici depuis trop longtemps. Nous avons déjà emballé sa corruption, son indécision et ses mensonges. Tout ce qui lui reste à faire, c'est de se lever et partir.

Malgré le théâtre pré-électoral, une portion significative de l'électorat reste indécise. Raphael Ahren du Times of Israel a rapporté sur Twitter :

18 % des électeurs israéliens sont encore indécis, me disent les politologues.

Khulud Khamis, qui collabore à l'organisation féministe arabe Kayan et est l'auteur du récent roman Haifa Fragments, qui offre une vision nuancée des vies de femmes arabes en Israël et Palestine, a expliqué son dilemme : qui voter, et même voter ou pas : 

Voter ou ne pas voter, telle est la question. La Liste arabe unifiée m'a d'abord jetée dans la confusion. J'ai toujours perçu voter comme une responsabilité personnelle du citoyen. Mais pour la première fois de ma vie, j'ai eu des doutes. Je ne savais que penser. Comment puis-je voter pour une liste comportant des islamistes, des nationalistes et des partisans de la polygamie ? J'ai donc décidé de ne pas voter.

Mais les jours qui passent m'ont fait comprendre que plus qu'une responsabilité, voter est mon droit. Et un droit durement gagné pour lequel des femmes avant moi ont lutté en mon nom. Comment pourrais-je ne pas voter ?

… Je vote pour la Liste Arabue unifiée parce que Ie passé me rend malade. Avec tous les défis et les aspects problématiques, je pense qu'il est temps d'adopter le changement et l'incertitude, parce que les vieilles pratiques ne nous ont certainement emmenés nulle part. Alors je donne une chance, en espérant que cela mènera au changement. Parfois on doit faire un pas en avant, changer de direction, et adopter l'incertitude.

Même pour ceux qui ont décidé de leur vote, il n'y a pas de choix évident. Jen de Tel Aviv raconte une division familiale dans l'isoloir : 

Demain notre famille de 4 va voter ; pour au moins 3 partis politiques. Est-ce que cela changera quelque chose ?

Le blogueur populaire The Muqata a publié un logigramme pour ceux en mal d'orientation électorale, avec le commentaire, “Maintenant tout est clair”. 

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Le blogueur Adam Vinokoor a aimé l'idée et proposé cette infographie de son cru pour expliquer les tourments partisans. 

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Le blogueur éponyme Anne's Opinions poste ce visuel, qui redispose les bulletins de vote de façon à lire : “La vérité  – ils sont tous des menteurs” (“האמת – כולם שקרנים”):

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A noter que “vérité” ou “אמת” est le symbole du bulletin de vote de l'Union Sioniste.  

Le thème prioritaire de l'élection semble être la sécurité de l'Etat, suivi de près par son jumeau ombilical, l'identité juive/nationale. Mais l'économique et le social ne se laissent pas si facilement oublier des électeurs. Noga Tarnopolsky nous rappelle la réalité économique israélienne : 

Si Netanyahu perd le pouvoir, ce sera pour ça

Au-dessus de tous ces coups de clairon, l'énergie des électeurs est positive. A l'aube du scrutin, la journaliste et blogueuse Sarah Tuttle-Singer, avec “Devinez pour qui je vais voter ?”  illustre le mieux l'optimisme du pays. 

Et surtout, je vote pour le pays imaginé par nos fondateurs  — une patrie reposant sur des principes magnifiques d'égalité, de justice et de vertu — les valeurs mêmes dont sont imprégnées notre peuple et notre culture antiques, choisies à travers nos histoires diverses… des valeurs qui respectent la dignité fondamentale des autres, qui peuvent avoir d'autres fois et prier en d'autres langues.

Cette élection est importante — nous avons atteint un point où nous devons montrer au monde qui nous sommes. Nous devons regarder notre visage dans le miroir et espérer l'aimer assez pour lui rendre son sourire.

Alors oui, je vote.
Et je vais vous dire pour qui :

Je vote pour Israël.

Suivez la journée électorale sur les médias sociaux, avec : #IsraelElections, #IsraElex (le mot-dièse originel des élections), et #IsraelElex

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