Hongrie : Une fête nationale mouvementée

La semaine dernière, la Hongrie célébrait le 164ème anniversaire de la révolution de 1848. Le 15 mars 2012, l'opposition a élu un rappeur ‘président alternatif’ – au moment où le premier ministre comparait le pays à une grenouille sautant à la dernière minute d'une casserole d'eau bouillante, et un carré de manifestants d'extrême droite faisait irruption dans les bureaux du Fonds Monétaire International. Le 16 mars, une rave-partie a eu lieu sur la Place des Héros de Budapest. Et le 17 mars, les nouvelles recrues de la Garde Nationale Hongroise prêtaient serment au même endroit.

Peu avant la fête nationale du 15 mars, les médias hongrois avaient consacré quelques articles aux sympathisants polonais et français venus en renfort des rassemblements. Le blog Véleményvezér a publié un billet [en hongrois] à ce sujet, sous le titre “15 mars : merci, mais nous ne voulons pas importer de  manifestants !”:

[…] On dirait que les commémorations de la fête nationale hongroise vont devenir de vrais événements internationaux. Gazeta Polska, un hebdomadaire de droite, rapporte sous le titre “Un long voyage vers la Hongrie” que plusieurs milliers de Polonais sont en route pour la Hongrie afin de soutenir Viktor Orbán. Les intellectuels de gauche français ont lancé une invitation publique disant que c'est une affaire de conscience de venir en Hongrie assister à la manifestation Milla contre le gouvernement ‘nationaliste’ du Fidesz. […]

Polish supporters of Jaroslaw Kaczinsky's party, the PiS, have arrived in Hungary to support the Hungarian PM Viktor Orbán on the National Day. Photo by DAVID FERENCZY, copyright © Demotix (15/03/12).

Les supporters polonais du PiS, le parti de Jaroslaw Kaczinsky, sont arrivés en Hongrie pour soutenir le Premier Ministre hongrois Viktor Orbán le jour de la fête nationale. Photo DAVID FERENCZY, copyright © Demotix (15/03/12).

Les représentants invités des deux pays ont assisté aux deux événements principaux de la journée, les Polonais surtout aux festivités officielles du gouvernement et au grand événement de l'après-midi du 15 mars, avec l'allocution du Premier Ministre Viktor Orbán [en anglais]. Quant aux hôtes français, ils étaient essentiellement présents à la plus grande manifestation de l'opposition aux côtés des mouvements de la société civile.

Cette dernière était organisée au moyen du groupe Facebook ‘Un Million pour la Liberté de la Presse en Hongrie‘ (la page miroir en anglais est ici), connue sous le diminutif ‘Milla’. Milla démarra aussi sa manifestation dans l'après-midi, avec un discours de Dopeman, un rappeur populaire, qui s'est reconverti avec succès de chanteur populaire à artiste exprimant l'opinion d'une vigoureuse opposition citoyenne en publiant une chanson sans équivoque reprenant en partie les paroles de l'hymne national hongrois [en hongrois].

Commencé à la fête nationale du 23 octobre 23, Milla a lancé un concours aussi controversé qu'incohérent pour le poste de ‘président alternatif’, dont le vainqueur a été Dopeman. (Le mouvement a admis sur son blog [en hongrois] que le déroulement du concours laissait à désirer.)

Le rappeur a énuméré les multiples problèmes de la société hongroise dans son discours d'ouverture [en hongrois] du 15 mars, citant aussi les paroles de ses chansons sur les galères de la vie en Hongrie. Ensuite la parole a été donnée aux représentants des catégories sociales affectées par les politiques actuelles du gouvernement : étudiants, journalistes, membres des associations de la société civile, etc…

A military parade in Budapest on the National Day of Hungary. Photo by DAVID FERENCZY, copyright © Demotix (15/03/12).

Une parade militaire à Budapest le jour de la Fête Nationale hongroise. Photo DAVID FERENCZY, copyright © Demotix (15/03/12).

Au même moment, devant le Parlement hongrois, le Premier Ministre Orbán comparait la société hongroise endettée à une grenouille à l'aise dans une casserole d'eau bouillant à petit feu jusqu'à ce qu'il soit presque trop tard.

Sa critique de l'UE a été soulignée dans les média internationaux [en anglais], et voici ce qu'en a dit Eva Balogh sur son blog [en anglais] :

[…] Quant au climat politique actuel en Europe, Orbán a lancé quelques traits acrimonieux sur ce sujet. Les Hongrois comprennent que “l'Union Européenne n'est pas une alliance de saints mais ils ne peuvent regarder les bras croisés une certaine tendance politique et intellectuelle imposer une alliance impie à l'Europe.” […]

Vers la fin de la manifestation Milla, un mouvement d'extrême-droite, le ‘Mouvement de Jeunesse des soixante-quatre comitats‘ (en référence au découpage administratif d'avant le traité de Trianon, un souvenir amer dans l'histoire hongroise) a tenu un rassemblement au même endroit, suscitant un conflit auquel la présence de la police a mis fin. Le mouvement de jeunesse s'est alors rendu au bureau hongrois du Fonds Monétaire International, pour remettre une pétition aux représentants de l'organisation, et quand ils se sont entendu dire que ce n'était pas possible, ils ont allumé des pétards à l'intérieur de l'immeuble. Le blog Egyenlítő a enregistré l'opération et mis la vidéo sur YouTube.

Le 16 mars restait la célébration de la révolution de 1848, mais certains jeunes de Budapest ont voulu la fêter à leur manière. ‘Plus de techno au Parlement‘ est un mouvement opposé à la situation politique actuelle, tout en y réagissant avec des termes clés du discours politique. Ils organisent des raves lors des fêtes nationales, où ils parlent de la ‘question techno’ et défendent l'idée d'une ‘radio techno d'Etat’, sans esquiver l'aspect du besoin de systèmes d'amplification professionnels et d'un DJ dans chaque village. Cette fois la rave était sur la Place des Héros de Budapest :

Le 17 mars, aussi sur la Place des Héros, quelque 130 personnes ont prêté serment [en hongrois] d'intronisation dans une milice appelée la Garde Nationale Hongroise. Les ‘gardistes’ sont devenus populaires depuis quelques années en Hongrie, mais du fait de ses activités extrémistes, la Garde Hongroise, son noyau, a été interdite [en anglais]. Des mouvements analogues sont réapparus dans des villages du nord du pays (articles parus sur Global Voices à leur sujet ici et ici), menacer la population de Roms de leur présence.

Cette vidéo montre les manifestants anti-extrême-droite, à leur tour, tenant des banderoles disant ‘Non à la Garde’, ‘Non au racisme’.

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