Le gagnant du Lion d’Or, “Pieta”, révèle la face cachée de la société sud-coréenne

[Les liens sont en anglais ou en français sauf mention contraire] Le Lion d’Or a été attribué au film coréen “Pieta”, qui a également été sélectionné pour la 84ème cérémonie des Oscars dans la catégorie du meilleur film en langue étrangère. Pieta a fait parler de lui dans les médias et est à l’origine de vastes débats sur la blogosphère coréenne cette semaine. Comme le film est devenu le centre de l’attention médiatique, d’autres révélations sur le côté sombre de la société coréenne ont vu le jour.

Bien que le film ait atteint une reconnaissance monumentale dans l’histoire du cinéma coréen en recevant l’une des plus prestigieuses récompenses à la Mostra de Venise le 8 septembre 2012, le réalisateur du film a confié qu’il avait toujours du mal à trouver des salles pour diffuser son film en Corée du Sud. Certains utilisateurs de Twitter supportent sa cause en twittant qu’il n’y a pas de cinéma diffusant le film dans la ville de Choogju [en coréen], de Masan [en coréen] et qu’aucun multiplex de la région [en coréen] ne le propose à l’affiche.

http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=jBpEiDwNuN8

“Pieta” est un film brutal. C’est l’histoire violente d’un usurier qui rencontre un jour une femme se revendiquant comme sa mère dans son chemin vers la rédemption, chemin qui s’égare finalement vers une fin désastreuse. L’histoire a été interprétée de manière à révéler l’aspect inhumain et dangereux d’une société coréenne très matérialiste. L’internaute @whitestar612 écrit [en coréen] sur Twitter :

[…] 영화 ‘피에타'는 자본주의가 결국 없는 자들이 서로 물어 뜯어 죽이는 구조라는 것을 극단적으로 보여주는 영화였다. 픽션이지만 결코 픽션으로 넘어갈 수 없는 우리 사회의 단면.

Le film “Pieta” montre que le capitalisme est un système qui force les pauvres à s’affronter entre eux jusqu’à la mort, de façon exagérée. Bien que le film ne soit pas fondé sur une histoire vraie, il révèle si bien le côté sombre de notre société qu’il est difficile de considérer ce film comme une pure fiction (comme une “fausse” histoire).

Un autre internaute, @slowcinema, commente [en coréen] :

영화 ‘피에타'는 우리 사회로부터 소외되고, 외면당한 채 처절하게 살아가는 사람들을 대상으로 삼고 있었고, 곪아터지기 직전, 너무도 고통스런 그들의 현실이 아프도록 적나라하게 드러나 있었다.

Le film “Pieta” illustre les vies difficiles des oubliés, des personnes que la société ignore. Il dépeint la dure et douloureuse réalité qu’ils doivent affronter, alors que les problèmes jaillissent et s’enchainent les uns aux autres.

Les critiques sur le film et le réalisateur ne sont toutefois pas positives à l’unanimité. Les travaux du réalisateur Kim Ki-duk, bien que loués par les critiques et admirés par les amateurs d’art, ont été rejetés par le grand public. La plupart de ses films sont brutaux, violents et souvent misogynes. Une majorité de femmes apparaissant dans ses films sont souvent violées, abusées physiquement et mentalement par des personnages masculins. Sur Daum Agora, l’un des plus gros forums coréens, l’internaute bestlife parle [en coréen] au nom du grand public.

영화를 보고 마음이 평안해지는 것이 아니라 토할 것 같은 역겨움…억지로 보라는 건지…여성관객들을 유린하는 듯한 영화[…] 강자에게 억압당하고 약자에게 화풀이하는 현상이 반복되고 있습니다.

J’avais la nausée et j’ai cru que j’allais vomir après avoir vu le film. On a vraiment besoin de se forcer pour regarder celui-ci (ce n’est vraiment pas plaisant). Le film lui-même semble violer l’audience féminine. […] Ce film répète simplement le cercle vicieux où les faibles, après avoir été oppressés par les forts, se défoulent avec rage sur les plus faibles qu’eux.

Bestlife fait une remarque très dure [en coréen] par rapport au thème du viol qui est omniprésent dans le film. Il présente le réalisateur comme “celui qui a gagné le succès en torturant et violant des femmes”.

D’autres se concentrent d’avantage sur les origines personnelles du réalisateur. Kim est largement considéré comme un marginal dans l’industrie du cinéma coréen. Il a eu des problèmes durant de nombreuses années en refusant de faire des films commerciaux pour le grand public. L’utilisateur @ichwell écrit [en coréen] sur Twitter :

김기덕의 수상은 자랑스러우면서도 한편 부끄럽다.사실 한국영화계가 그에게 해준것이 없다.그의 제작비의 대부분은 자신의 돈과 해외판매 수익으로 충당된것이다.한국영화계가 키워낸 감독이 아니라 한국밖의 관객과 영화인이 키운 감독이다.

Je suis fier que Kim Ki-duk ait gagné cette récompense mais je me sens honteux en même temps. L’industrie du film coréen n’a jamais rien fait pour lui. La plupart des coûts de production de ses films ont été couverts par lui même ou bien par les bénéfices qu’il a fait à l’étranger. Ce réalisateur est admiré par les étrangers et par l’industrie du cinéma en dehors de Corée, et non pas par la communauté cinématographique coréenne.

L’utilisateur haeorm a écrit un article détaillé [en coréen] sur Agora, louant le succès du réalisateur.

그의 상업적 영화에 대한 불신과 순수 예술영화에 대한 고집 때문에 20년 째 국내 영화계에서는 이단적 괴물급 아웃 사이더 감독으로[…] 공식 학벌이 중졸이고 서울 청계천이나 구로공단에서 노동자 생활을 하며 청년시절을 보냈던 바닥 인생 김기덕이 어찌하여 한국사회에 굳어저 있는 학벌,노동,무식,빈곤,차별이라는 철옹성과도 같은 진입 장벽을 뚫고 […]

Il fut un outsider, un mutant dans l’industrie cinématographique coréenne pendant deux décennies à cause de son obsession pour une certaine pureté artistique et de sa méfiance pour les films commerciaux. Son éducation supérieure prends fin au collège et il passa sa jeunesse travaillant comme ouvrier à Cheonggye, à Séoul et dans le complexe industriel Guro. Mais il s’est élevé de cette condition, brisant les barrières sociales que rencontrent les moins éduqués, les ouvriers, les pauvres […].

Cet internaute a ajouté que Kim est un exemple. Il a élevé sa condition de miséreux à celle d’une personne respectée. Son expérience apporte de l’espoir aux jeunes coréens qui doivent faire face aux même difficultés.

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