Brésil : La route vers la Coupe du Monde et les JO est pavée d'expulsions

Les préparatifs de la Coupe du Monde de football 2014 au Brésil, qui sera suivie des Jeux Olympiques de 2016, se soldent par des milliers de personnes expulsées de leur logement pour laisser la place à des immeubles de bureaux, des stades et des routes. Des vidéastes ont produit  des documentaires pour alerter les internautes et défendre les droits des personnes qui courent le risque d'être expulsées.

L'ONG WITNESS s'est associée à Habitat International Coalition et plusieurs associations locales de Rio de Janeiro pour former des activistes à l'usage de la vidéo afin qu'ils puissent couvrir les expulsions sur les sites concernés par des nouveaux projets immobiliers. Toutes les vidéos sont sous-titrées en anglais.

Jorge stands in front of his flooded house where his neighborhood used to stand. Documentary still.

Jorge devant sa maison inondée, dans le quartier disparu qui était le sien. Photos extraite du documentaire.

Même si les projets de développement signifient au final un meilleur environnement urbain pour la population, pour ceux qui sont expulsés, il peut aussi y avoir des abus, comme WITNESS le rappelle sur le site de sa campagne:

Un projet qui se construit sur leur propriété, sur leur maison, est souvent synonyme de destruction d'une communauté, de rupture de leurs vies, et d'appauvrissement. Les projets de développement passent par l’ expulsion forcée d'environ quinze millions de personnes chaque année (estimation). Les expulsions ne sont pas concertées, et, souvent, les promoteurs n'ont aucune obligation d'offrir un dédommagement décent, de reloger les gens, de rénover les infrastructures physiques et sociales qui constituaient la communauté. Les abus comme l'absence de maisons pour reloger, pas d'accès à l'eau, aux écoles ou aux hopitaux  peuvent être les résultats de l'expulsion autoritaire.

Dans la vidéo suivante, nous suivons la chef de projet Priscila Néri durant la réunion des stagiaires. Après avoir reçu une formation théorique sur comment tourner une vidéo documentaire et planifier leur tournage, les stagiaires sortent pour tourner des images et réaliser des interviews qui constitueront les temoignages des habitants de  Canal do Anil, à l'ouest de  Rio, où les chefs de quartiers racontent comment ils ont pu résister et refuser l'expulsion forcée entrainées par les Jeux Panaméricains de 2007. Il existe une version en portugais, disponible sur le site UniversalSubtitles.

Les habitants de Restinga, par l'intermédiaire du réseau ‘Plataforma Dhesca Brasil’, ont pu  ainsi raconter leur histoire. Ils ont été expulsés par la force avant d'avant pu négocier un quelconque dédommagement, leurs maisons et leurs magasins ont été démolis pour construire une voie rapide tandis qu'ils regardaient depuis la rue, “jetés comme des ordures”, selon leurs mots.

A Morro da Providencia, la ville construit un funiculaire : mais les habitants n'ont jamais été consultés sur le projet et ils n'ont pas exprimé leur accord, ce qui viole la loi brésilienne.  Maintenant, leurs maisons ont été marquées pour être démolies, mais personne ne leur a dit ce qui allait arriver une fois que leur maison serait rasée. Les habitants de Morro da Providencia, dont beaucoup sont nés là, soulignent qu'ils ne sont pas opposés aux travaux, mais à la manière dont ce projet est mené, puisqu'il ne prend pas leurs droits en considération.

La Favela do Metro est peu à peu rasée, au fur et à mesure que les familles partent. Sommés de choisir entre un dédommagement s'ils partent, ou se retrouver sans maison s'ils restent, beaucoup ont commencé à quitter peu à peu la favela. Mais ceux qui restent doivent affronter des montagnes de gravats dans leur quartier,  le gouvernement ayant décidé de ne rien déblayer tant qu'ils ne seront pas tous partis, ce qui est une autre façon de forcer les habitants à partir. Malheureusement, ce sont les pauvres, qui dépendent pour survivre d'avoir un toit, qui sont le plus à risque quand le gouvernement décide de lancer un nouveau projet.

Jorge, qui vit à Vila Recreiro 2 dit que seulement 12 familles, sur  235, résistent encore à l'expulsion. Il parle des vies de ceux qui sont déjà partis : leurs enfants ne peuvent pas aller à l'école car ils ont été déplacés dans des endroits où l'école locale n'avait pas de place pour les accueillir et ils sont trop éloignés de leur ancienne école pour y revenir.  Certains ont de longues heures de transports pour aller travailler, d'autres ont perdu leur travail. Actuellement, sa maison est constamment inondée, les équipes d'ouvriers lui ont coupé l'eau et bouché l'évacuation des eaux usées. Il demande que soient respectés ses droits aux termes de la loi brésilienne, et il parle des situations dont il a eu vent dans d'autres quartiers : le gouvernement n'a jamais averti de ses projets les quartiers qu'il allait démolir.

Au-delà des vidéos, la stratégie de diffusion de leur message est aussi enseignée durant l'atelier, pour atteindre le public qu'ils ciblent. On peut le lire sur le billet “Formation contre les expulsions forcées à Rio : l'activisme social, comme une Samba” de Mary Allison Joseph:

Durant la formation, les participants ont identifié le maire de Rio, Eduardo Paes, comme la principale cible de la campagne, puisqu'il est l'acteur qui a le plus de pouvoir direct pour bloquer les expulsions. Les stagiaires ont ensuite décidé de cibler trois publics à travers les vidéos de la campagne : la magistrature de Rio, les quartiers concernés et les acteurs étrangers, qui ont tous beaucoup d'influence sur le maire Paes. Ces trois publics cibles sont à la base de trois types de campagnes  en vidéo, et chacun a achevé la formation avec des vidéos de campagne détaillées. Mises bout à bout, ces vidéos de campagne représentent des initiatives concrètes et stratégiques pour changer la politique locale durant la préparation de la ville pour ces méga événements.

Les vidéos sont disponibles sur la chaine Youtube de Priscila

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