Liban : Solidarité avec les Palestiniens de Gaza

Traduit par Louise Nussac, Claire Vaysselier et Rogio Ramiliarimanana de la classe préparatoire ECS3 du Lycée Ozenne de Toulouse, sous la supervision de leur professeur Audrey Lambert, dans le cadre du projet pédagogique Initiation à la traduction d'actualités.

« A Gaza, il y a un petit garçon debout, qui attend de dormir ». Ce sont les mots que Mazen Kerbaj [en anglais, comme tous les blogs cités sauf mention contraire] a choisi pour résumer la situation à Gaza dans l’une de ses illustrations. Si l’on y regarde à deux fois, l’illustration semble en réalité dire : « A Gaza, il y a un petit garçon debout, qui attend de mourir ».

On peut également considérer cela comme le point de vue de la plupart des blogueurs libanais qui ont publié des articles à propos de la détresse des Palestiniens à Gaza.

La plupart des Libanais se reconnaissent dans ce qui se passe dans la bande de Gaza à cause des souvenirs encore récents de la guerre qu’a menée Israël contre le Liban en juillet 2006, bien que beaucoup aient dit que les conditions déjà mauvaises à Gaza rendent leur situation bien pire que celle du Liban en juillet 2006. Green Resistance exprime ce sentiment dans l’un des nombreux articles sur Gaza et déclare que :

« L’offensive contre Gaza semble pire que celle contre le Liban en juillet 2006. Au moins, une étroite porte de sortie permettait aux gens du sud du Liban de s’enfuir en juillet 2006. Bien que de nombreuses personnes aient été tuées sur le trajet et sur les artères principales alors qu’elles rejoignaient le nord, beaucoup ont néanmoins pu quitter les zones bombardées. Les gens de Gaza n’ont nulle part où aller. L’enclave occupée par les 1,5 million de Palestiniens à Gaza ne cesse de se réduire. »

Tarek at Beirut NTSC écrit à propos de son amie et de ses trois enfants, dont la plus jeune est une petite fille de 15 mois. Ils sont toujours à Gaza alors que les bombardements continuent. Pour lui, la tragédie de Gaza a désormais un visage :

« Si j’écris cet article sur mon blog, c’est parce que pas plus tard que ce matin, j’expliquais à un ami allemand habitant Beyrouth qu’en temps de guerre, il y avait toujours un havre de paix et de sécurité au milieu de toute cette folie. Et pour je ne sais quelle raison, j’ai ajouté : « Je connais quelqu’un à Gaza en ce moment même, et j’espère qu’elle et sa famille vont bien, mais je sais aussi qu’il doit y avoir un havre de paix là bas aussi … » Je ne diminue en aucun cas l’intensité ou l’ampleur de ce qui se passe à Gaza, mais je dois admettre que, alors qu’avant je compatissais avec les gens de Gaza « théoriquement » et par pur altruisme, la tragédie a désormais un visage humain pour moi – Ola, son mari et leurs trois enfants. Je pense tout particulièrement à Rasha, sa fille de 15 mois, qui est soit heureusement inconsciente de ce qui se passe, ou – au contraire – enregistre tout ce qu’elle peut voir et entendre. En tant qu’enfant de la guerre moi-même, je pense également à Malek – le second enfant d’Ola, mais son premier fils (d’où son surnom « Oum Malek ») et je me revois à 10 ans, dans Beyrouth en guerre et je me demande si Malek grandira en adoptant les mêmes réflexes de guerre que ceux que ma génération a eus. […]

Mais le réaliste que je suis ne peut qu’être optimiste – peut-être est-ce ainsi que mon peuple et moi avons survécu à la guerre – et je pense désormais à Ola, le visage souriant et avec ses valises, attendant de traverser l’Egypte et de nous rejoindre – Je sais que, même dans l’abri le plus profond de Gaza, ce sourire perdure (berçant probablement Rasha dans son sommeil) et il est la meilleure arme contre toutes les agressions, le témoignage d’une envie de vivre, de défier l’ennemi, de combattre l’oubli et la mort. »

Jamal a écrit que les actions menées contre Gaza ne contribueront qu’à une haine plus forte envers Israël, ce que cette derniere ne peut, selon lui, pas supporter. Il poursuit en déclarant que ces actions sonnent le glas d’Israël.

« Aujourd’hui, les gangs israéliens armés jusqu’aux dents ont fait ce qu’ils savent le mieux faire : tuer pour tuer. Bien qu’Israël ait été depuis sa naissance un fiasco sur le plan moral, les massacres actuels tendent à prouver qu’il s’agit également d’un fiasco militaire. Les défaites de 2006 aux abords de Maroun El Ras et de Bil Jbeil ont marqué le début de la fin.

Israël peut bien utiliser tout l’argent des impôts américains pour sa machine de guerre mais lorsque l’état lance une campagne d’anéantissement de cibles fixes comme ces commissariats de police qu’ils ont visés aujourd’hui juste dans le but de tuer autant de barbus que possible, cela n’en reste pas moins un signe de déclin. Militairement, ils n’ont rien gagné, stratégiquement, ils ont perdu la guerre. Si tout ce dont est capable un programme militaire complet sur 60 ans ce sont de lamentables crimes de guerre, alors il n’est pas confronté à une « menace existentielle », il ne mérite tout simplement pas d’exister. »

Jamal souligne également que les actions des militaires israéliens vont poser problème pour les chefs d'états arabes, et plus particulièrement pour ceux qui ont des accords de paix avec Israël, pour tenter ce que l’on appelle la « normalisation » des rapports avec l’état :

« Il ne fait aucun doute qu’Israël, sous la sage direction de Olmert, Livni et Barak, s’en sortira en ayant perdu sur de nombreux fronts. Sur un plan militaire, ils ne peuvent que tuer sans aucune distinction et leur insatiable soif de sang se répand dans tous les foyers de la planète, révélant encore davantage leur nature barbare. Pendant ce temps, sur un plan politique, ils risquent de perdre de perdre les progrès historiques qu’ils avaient faits avec leurs alliés arabes. Il ne fait aucun doute que la coopération israélienne avec les deux Abdallah, Hashem et Saoud, continuera de manière moins dissimulée. Cependant, plus les massacres continueront, et plus les dictateurs arabes auront du mal à encourager ouvertement les efforts de naturalisation. En 2006, on a pu voir comment Moubarak, les Saoud et les Hashem ont paniqué après qu’Israël a échoué dans sa tentative d’anéantir le Hezbollah. Ils se sont empressés dans leurs efforts de maîtriser les dégâts en essayant de devancer les autres afin d’effacer toute trace des crimes qu’ils ont commis. Ils feront sans doute de même à Gaza. »

Rami Zurayk a écrit à propos de l’humeur générale des Libanais qu’il rencontre, en particulier dans le sud du pays. Il a noté qu’ils étaient passés en « mode guerre » et a également mentionné les manifestations et les veillées qui s’y déroulent:

« J’étais en route pour le sud du Liban hier quand j’ai été informé de l’offensive israélienne sur Gaza. Je me suis arrêté en chemin pour trouver un peu de nourriture, et il y avait déjà 100 morts. Les Libanais du sud soutiennent massivement les habitants en détresse de la bande de Gaza : les souvenirs de 2006 sont encore trop présents et ce qui se passe là bas fait penser aux événements de juillet 2006. Ce matin, on a entendu les avions bombardiers d’Israël dans le sud. La radio et la télévision nous l’ont confirmé. Les gens ont commencé à s’inquiéter. Dans le village, les boulangers discutaient de la situation à Gaza. J’ai senti que l’humeur avait changé, que les gens étaient passés en « mode guerre ». A Beyrouth, des jeunes manifestaient devant l’ambassade égyptienne contre la fermeture ininterrompue par l’Egypte de la frontière de Rafah. Ils ont commencé à lancer des pierres et des chaussures sur l’ambassade, l’armée est intervenue avec des boucliers, des matraques, des jets d’eau et des bombes lacrymogènes. Les manifestants se sont repliés dans le stade non loin de là et ont bloqué la route avec des pneus en feu. Je les ai vus en revenant du sud. »

Léa [en arabe] critique ceux qui qualifient la réaction d’Israël de « disproportionnée », et se demande si ce qui est en train de se passer deviendrait plus acceptable si la réaction militaire et le nombre de tués étaient plus « modérés ».

New Phoenicia critique ce qu’il décrit comme étant la « morale occidentale » et la « fraternité arabe » pour avoir abandonné les habitants de Gaza durant les années de siège et les avoir rendu responsables de ce qui leur arrive aujourd’hui car ils ont tenté de riposter et de se libérer de leur malheur:

« Il n’y a pas de mots.
Le monde a regardé Israël priver les habitants de Gaza de nourriture, de médicaments et de toutes les ressources essentielles pour ensuite leur imputer leurs souffrances.
Quand les habitants de la bande de Gaza voient que le monde ne fait rien pour soulager leur peine, ils essaient de riposter avec de pathétiques petites roquettes, et le monde observe et rend Gaza responsable des bombardements qui tuent sans discernement.
Le monde a dit à ces gens-là qu’ils ne signifiaient rien, qu’ils ne valaient rien.
Ils ont été abandonnés par la « morale » occidentale. Ils ont été abandonnés et trahis par les chefs de leurs « frères » arabes.
Et ensuite le monde se demande ce qui exactement rend ces jeunes hommes musulmans si furieux.

Cold Desert utilise la définition du mot « terroriste » et les événements actuels pour pointer du doigt les origines du « terrorisme ». Il critique également ce qu’il décrit comme étant des actions inefficaces telles que les manifestations et ce qu’il qualifie de « résistance numérique ».

« Tout d’abord, résumons ce qui s’est passé,
Les offensives aériennes [d’Israël] qui ont commencé Samedi, et dans lesquelles les Palestiniens déplorent au moins 280 morts…
Jetons maintenant un coup d’œil rapide dans le dictionnaire Oxford. On peut lire,
Terroriste
Nom : personne qui utilise la violence et l’intimidation à des fins politiques.
Dérivés : terrorisme (nom)

Et donc, que sont le gouvernement et l’armée israéliens, et tous leurs alliés ? Oui, vous avez deviné.
Bon, il semble qu’ils prennent aussi plaisir à être terroristes.

Maintenant, que font les pays arabes ? Quant aux Rois, Princes et Prostituées arabes (n'est-ce pas la traduction de عاهل?), ils recherchent également plus de plaisir en servant leurs maîtres.
D’un autre côté, que font les foules arabes ?
Les méthodes habituelles et inefficaces, les protestations et autres techniques similaires sans résultat qui se sont avérées parfaitement inutiles.
En ce qui concerne les jeunes arabes qui ont accès à Internet, ils peuvent tout aussi bien protester par des moyens plus modernes comme en rejoignant sur Facebook des groupes nommés “Gaza libre”, “la paix de Gaza”, ce genre de choses….
C'est la naissance de la résistance numérique mes amis. Si nous arrivons à avoir 1000 adhérents au groupe de Facebook “Gaza libre”, alors Israël succombera.”

Adonis49, dans son rapport bi-hebdomadaire sur le Liban, accuse Israël de ce qu'il décrit comme étant “un massacre” et lui reproche de travailler au maintien de l'insécurité et du chaos.

Il accuse dans le même temps le président égyptien de donner à Israël le feu vert pour qu'ils poursuivent leurs attaques :

“Les informations nous montrent en direct la dernière tuerie de l'état sioniste ; Israël a bombardé la Bande de Gaza avec 60 avions de chasse et a tué en l'espace de trois minutes 200 Palestiniens et a fait 350 blessés graves; les médias ont montré en direct les corps de 40 policiers palestiniens qui ont péri dans leur quartier général alors qu'ils assistaient à une cérémonie de remise de diplômes; un survivant blessé proclamait “La illah ella lah” (Dieu est un).Israël a l'intention d'éliminer toutes les forces de police de Gaza dans l’espoir que cela provoque l'insécurité totale et que le chaos s'installe. Le sioniste Livny, ministre des affaires étrangères, a rencontré hier Moubarak, ce traître de président égyptien, et a donné son feu vert pour que soient décapités les chefs du Hamas; ce qui signifie la décapitation des policiers et des civils aussi.”

Dans une longue analyse historique, citant ce qu'Israël a fait au Liban et dans la région durant ces dernières décennies et comment ses actions n’ont fait qu’augmenter la violence et la résistance au lieu de les éliminer, Lebanese Chess en conclut donc que la même chose se reproduira cette fois et que le Hamas en sortira plus fort que jamais :

“Israël continue cette même politique aujourd'hui. Ils croient qu'en frappant les civils sur le territoire du Hamas, les palestiniens retourneront à Abbas et concluront un accord basé sur des conditions israéliennes.

Mais ce qu’ils obtiendront c'est un autre Hamas, un Hamas plus grand et encore plus de Palestiniens déterminés à se battre. Cela a rendu le recrutement du Hamas d'autant plus facile qu'il rivalisera désormais avec Al Quaida pour dégoter de très jeunes talents.

Des attentats suicides se reproduiront dans les villes israéliennes après plusieurs années de calme relatif. Israël va apporter la guerre jusque dans ses propres rues, mais ce n'est pas tout.
Le Hamas ne redeviendra pas seulement un groupe de scélérats extrémistes qui commet des attentats suicides aléatoires et qui lance quelques fusées artisanales.
Le Hamas, jouissant ainsi de sa toute nouvelle notoriété, se déplacera plus loin dans les bras de Téhéran tout en cherchant plus de sophistication et d'entraînement.”

Après avoir décrit la triste situation qui existait déjà à Gaza avant les attaques israéliennes, Tarek at Letting Loose accuse Israël d’avoir atteint un niveau de barbarie qui ne fera que répandre la haine :

Quel genre de logique attardée peuvent avoir les Israéliens? Que pensent-ils exactement accomplir en lançant ces attaques sur Gaza? Répandre plus de haine chez les israéliens comme chez les arabes? Est ce qu'Israël gagnera les cœurs de 300 millions d'arabes et d'un milliard de musulmans en leur montrant le niveau de barbarie qu'ils ont manifesté ces trois derniers jours? Est-ce là la façon dont Israël recherche la sécurité pour sa terre et son peuple? […]
Israël est un état terroriste dont l'unique raison d'exister est la guerre et le sang arabe et musulman.”

Jnoubieh a publié un communiqué concernant la manifestation menée par le Hezbollah en soutien aux palestiniens de Gaza. L’article comprend également le discours fait par Nasrallah lors de cette manifestation :

” Des dizaines de milliers de libanais, de palestiniens et d'arabes ont répondu au secrétaire général du Hezbollah Hasan Nasrallah ce lundi et se sont réunis dans la banlieue sud de Beyrouth en signe de solidarité avec Gaza pour rendre hommage aux 318 martyrs qui sont tombés jusqu'à présent lors de l'attaque barbare d'Israël sur la Bande. Un manifestant a déclaré que les chefs d'états arabes devaient s'unir et se révolter contre les tyrans Israéliens.” Les chefs arabes sont invités à rompre sur le champ tout lien avec Israël et à faire pression sur l'Égypte pour qu'elle ouvre le poste-frontière de Rafah. “

Les drapeaux de la Palestine, du Liban et du Hezbollah ont été agités et des slogans anti-américains et anti-israéliens ont été scandés et des appels ont été lancés pour que l'Égypte prennent historiquement position et soutiennent Gaza au beau milieu d'une assistance arabe officielle silencieuse et suspicieuse. “Certains régimes arabes n'ont aucune dignité” a déclaré un manifestant en s'adressant à l'Égypte afin qu'elle ouvre la frontière pour la nourriture, les médicaments ainsi que les armes.”

Le dernier et non des moindres, Tajaddod Youth [en arabe] a publié une déclaration de solidarité de la part de la jeunesse du 14 mars [l'alliance politique pro-gouvernementale libanaise] avec les habitants de Gaza et a inclus dans cette déclaration quelques numéros de comptes bancaires pour tous ceux qui voudraient faire des dons en soutien aux Palestiniens de Gaza.

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