Maldives : Retour sur les premières élections parlementaires libres

Les Maldives ont connu des changements politiques importants au cours des cinq dernières années : l'introduction des partis politiques en 2005, la ratification d'une constitution, amendée en août 2008, et la première élection  multi partis qui a eu lieu en octobre 2008 et a élu un gouvernement démocratique. Par conséquent, l'élection parlementaire qui s'est tenue ce 9 mai était cruciale. Le nouveau parlement aura la tache de voter les principales lois qui rendront possible la transition du pays vers la démocratie.

Dans une bataille très serrée pour 77 sièges, sur la base de nouvelles circonscriptions électorales établies par la Constitution modifiée, plus de 400 candidats se sont affrontés. Une fois la fièvre électorale retombée, alors que les slogans de campagne ont déserté les ondes radio et que les affiches électorales des candidats se déchirent lentement sur les murs, le pays est peu à peu revenu à la normale. Toutefois, le résultat de cette élection aura un impact qui durera plusieurs années.

Les résultats montrent la prépondérance des deux grands partis politiques, le Parti démocratique maldivien (MDP), qui est arrivé au pouvoir au cours de l'élection présidentielle de l'année dernière et le dhivehi Rayyithunge Party (DRP) contrôlé par l'ancien président Maumoon Abdul Gayoom. Alors que certains voient cela comme l'intégration des partis politiques dans la société maldivienne, le premier véritable test du système des partis dans le pays, d'autres craignent une hégémonie des deux partis, qui feraient disparaitre les points de vue minoritaires. Curieusement, au cours de ces élections, certains députés qui avait participé au processus de démocratisation ont perdu leur siège au profit de nouveaux venus.

Le blogueur Abdullah Waheed suggère quelques raisons à l'échec de certains vétérans du parlement  dans son billet : “Certains gros calibres s'enraillent” [en anglais, comme tous les blogs cités].

Abdullah Waheed a également écrit sur les leçons que les grands partis politiques et les candidats ont tiré de cette élection, et conclut que l'électorat a largement accepté le système des partis aux Maldives.

L'électorat a donné un fort signal d'approbation au système des partis, comme indiqué par le succès écrasant des candidats des partis, dont plusieurs étaient inconnus, et qui n'auraient pas gagné avec des pourcentages à deux chiffres sans l'appui des partis. S'il est vrai que 13 indépendants ont gagné, certains d'entre eux ne sont pas vraiment indépendants, dans le sens habituel du terme.

Mohamed Nasheed, ancien ministre de l'information, et député élu, qui a remporté une circonscription en tant qu’ indépendant tout en étant un membre du DRP, arrive aux mêmes conclusions sur son blog.

L'image qui semble ressortir des récentes élections parlementaires, c'est que les Maldives sont amoureuses de la nouveauté des partis politiques. La plus grand partie du pays semble en proie à une euphorie mystique  créée par les deux principaux partis rivaux : le MDP et DRP. On dirait qu'il n'existe plus d'espace pour qu'un autre parti ou une autre opinion puisse s'épanouir.

Nasheed est également d'avis que le résultat de l'élection sera bénéfique pour les Maldives, comme aucun des deux grands partis n'a remporté une majorité de contrôle du parlement.

Je suis heureux que le parlement qui est né de ces dernières élections ne soit ni contrôlé par le MDP ni par le DRP. Bien que le DRP avec son allié le PA ait gagné un peu plus de sièges que le MDP, elles sont en deçà d'une majorité de contrôle.

Aucun des partis dans le prochain Parlement ne doit être en mesure de diriger les choses comme il le veut. Les décisions du Parlement devraient être prises dans le cadre d'un processus de dialogue et de délibération. Une nation divisée par la politique, et polarisée par les personnalités politiques, a besoin à ce carrefour d'une approche consensuelle de la gouvernance. Un parlement contrôlé par un parti  ne permettrait pas un  tel processus de délibération.

Les deux partis MDP et DRP tentent de séduire les candidats indépendants qui peuvent changer la direction du Parlement dans une certaine mesure, par l'alignement sur un parti. Le billet de Nasheed  a suscité des commentaires très intéressants. Parmi eux, un commentateur, Fayaz, part de son point de vue sur les partis qui se ruent vers les députés indépendants, bien que ses critiques se concentrent sur le MDP.

Les supporteurs du MDP, qui souffrent toujours de cette perte énorme et sont incapables de digérer la réalité, continuent à vouloir croire que leur performance a été fantastique. Le MDP tente d'acheter à n'importe quel prix l'appui des députés,  en particulier celui des députés indépendants. Est-ce que ce n'est pas tellement pathétique? Je veux dire, pour un parti politique dont le nom comprend le mot “démocratique” –  recourir à ce genre de tactique pour passer outre la volonté du peuple en dit beaucoup sur les principes du MDP et de ceux qu'il représente.

Le blogueur Iddu se plaint  que des candidats qu'il décrit comme des “jeunes patriotes”  aient perdu devant  les candidats riches et puissants :

Certains candidats soupçonnés de corruption ont gagné par une large majorité. Cela montre que nos électeurs sont aveuglés par un groupe de personnes influentes dans la société, pour obtenir un gain financier de ces candidats.

Il note également que certains candidats n'ont pas été en contact avec les réalités qui préoccupent leurs circonscriptions.

Certains candidats qui ont remporté des sièges ont à peine mis les pieds sur le sol de leurs circonscriptions et d'autres, qui prétendent leur appartenir, n'ont jamais vu le lever du soleil sur leur circonscription. Nous pouvons être très instruits, riches et influents et appartenir à un parti politique, mais comprendre les aspirations et des rêves des communautés locales n'est pas quelque chose qu'on peut saisir simplement en visitant sa circonscription une fois en passant.

L'ampleur de cette élection a été immense pour la Commission électorale et les électeurs se sont impatientés car  car il y a eu des retards dans l'annonce des résultats. Simon pense que le retard dans l'annonce des résultats peut être attribué au manque de préparation de la Commission électorale ainsi qu'à celle des institutions impliquées.

Je pense que la responsabilité pour la grossière et ridicule lenteur du comptage des bulletins de vote doivent être partagée par la CE, les médias, les électeurs et les parties concernées.

La commission électorale a totalement sous-estimé la complexité et l'ampleur de la tâche. C'est la raison pour laquelle, selon la CE, ils n'ont pas réussi à publier les résultats plus tôt, provoquant des soupçons parmi les électeurs et les partis politiques. Je n'avais pas mesuré le niveau d’ ignorance de la sécurité, des outils de haute technologie disponibles de nos jour, jusqu'à ce que je vois les files de télécopieurs alignés au siège de la CE. Les télécopieurs sont de vieilles technologies peu fiables. Un membre du comité consultatif de la CE a même admis que certains fax n'imprimaient pas de façon lisible. A quoi s'attendaient-ils avec des fax ?

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