Cuba : Concert pour la Paix ?

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“Juanes en Valencia” – crédit photo mtraker, sous licence Creative Commons . Visitez le compte flickr de mtraker.

L'Institut Cubain de la Musique a annoncé que le célèbre chanteur colombien Juanes devrait se produire [en anglais comme tous les liens cités] lors d’un « concert pour la paix » à La Havane le 20 septembre prochain. Le blog Repeating Islands confirme que :

Le journal du Parti communiste Granma a cité Osmany López, vice-président de l'institut, qui disait que le chanteur de 36 ans, qui a remporté cinq prix Grammies Latino l’année dernière est très heureux de chanter lors de ce concert en plein air auquel participeront d'autres chanteurs d'Amérique latine …

Juanes semble être l'un des rares à être enthousiaste. Les blogueurs cubains ? Le jury délibère toujours. Face aux critiques – en particulier celles de la diaspora cubaine des États-Unis – sur les signaux politiques qu'il pourrait envoyer en participant à la manifestation, Juanes a défendu sa position à la fois dans les médias traditionnels et via son compte Twitter . Mais peu de blogueurs semblent convaincus.

El Cafe Cubano demande :

Est-ce que Juanes demandera également la libération des prisonniers politiques ? Exigera-t-il la LIBERTÉ d'expression pour les Cubains ? Réclamera-t-il la démocratie à Cuba ?

Le Triangle cubain est d’accord que « son concert ne changera pas le monde, surtout pas Cuba », mais concède que « c’est parti pour être un grand succès, et des milliers de Cubains vont l'adorer ». Le blogueur analyse bien les deux revers de la médaille :

Interviewé sur Univision le 11 août (vous pouvez regardez la vidéo ici), il s’exprime comme un artiste, ce n’est pas un politique. Mais il pense aussi que l’idée d'un concert à La Havane n'est pas seulement profondément juste, mais significatif car cela a une signification politique : « Aller jouer à Cuba semble relever de l'impossible … donc, aller à Cuba signifie qu'il est temps de changer les esprits … Je veux aller à Cuba avec mes amis pour dire au monde entier, de Cuba, que les gens doivent changer ».

L’initiative de Juanes provoque des réactions à Miami. « Quand on parle de Cuba, on ne peut ignorer la politique, » dit la star américaine d’origine cubaine Willie Chirino lors de cette même émission sur Univision. Et il n’a pas tort – Juanes dit qu’il ne fait pas de politique, mais il veut changer le monde, c'est un peu difficile à saisir, même si c'est le genre de choses que les artistes disent tout le temps.

Le billet continue :

Les critiques ont raison de souligner qu'à Cuba, il n'y a pas de lieux de concerts ou de promoteurs privés, ainsi un événement de ce genre doit être approuvé par le gouvernement. Comme c'est un lieu appartenant à l’état, il se peut qu’un officiel fasse un discours. Et il y a ceux qui sont perplexes à l’idée d'un concert pour la paix à Cuba, alors que le pays n'est pas en guerre. Ils n’ont pas tort non plus.

Certains disent que Juanes ne devrait pas  aller à Cuba et que son concert sera déplacé s’il n’est pas accompagné d’artistes américains d’origine cubaine et n’utilise pas la plate-forme qui lui est offerte pour critiquer le non respect des droits humains par l’état cubain.

En fin de compte, le blogueur déclare, « Je suis d’accord avec Juanes. » Tout comme la blogueuse de La Havane Yoani Sanchez :

Il semble que, le 20 septembre, Juanes va tenter d’humaniser un ensemble architectural où personne n’ira s'asseoir tranquillement [la Place de la Révolution].

Je pense que Juanes devrait venir chanter. Si son sujet est la paix, il faut savoir qu’il n’y a pas de guerre sur cette ile, mais que la paix n’y règne pas non plus. Il chantera devant un peuple qui a été divisé, classé selon sa couleur politique et obligé d'affronter tous ceux qui pensent différemment. Une population qui depuis des années n'a pas entendu parler d'harmonie et que sait le châtiment infligé à ceux qui osent exprimer des critiques. Nous avons besoin de sa voix, mais seulement s’il vient chanter sans oublier aucun Cubain, sans rejeter aucune différence.

Même ainsi, Yoani Sanchez n'est que trop consciente du contexte politique qui entoure l'événement :

Nous aimerions qu’il s’accompagne des percussions de Willy Chirino, de la trompette d'Arturo Sandoval, du rythme d’Albita Rodriguez ou du saxophone sensuel de Rivera, Paquito D ‘… mais aucun d'entre eux ne sera autorisé à y aller. Juanes aura le privilège d’être l’étranger, qui, sur cette île, vaut beaucoup plus que les autochtones. Tout ce qu'il dira entre les chansons, s'il dit quelque chose, sera interprété comme un soutien à un système qui s'éteint, comme une accolade au pouvoir en place.

Ce n'était pas une décision anodine de choisir la Place de la Révolution pour jouer sa musique et il ne sera pas capable de se libérer du poids politique qu’il porte. Mais si cela doit en être ainsi … Alors, qu'il chante sous la statue de Martí, face à l'image de Che Guevara, mais au moins, laissez le chanter pour tout le monde.

Le Triangle cubain, qui sait que les « gosses de tous les âges » au pays « seront là pour la musique », a le mot de la fin :

S'ils trouvent que certains s'opposent au concert parce qu'il n’inclut pas le message politique adéquat, alors ils comprendront que la rigidité idéologique qui étouffe toutes les formes de créativité (expression, et initiative) – sans parler de plaisir tout court — est toujours vivant, pas seulement dans les bâtiments entourant la Place de la Révolution.

Les images utilisées dans ce billet sont de mtraker, sous licence Creative Commons. Allez sur : mtraker's flickr photostream.

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