Hongrie : Une longue journée d'élections

Le premier tour des élections parlementaires en Hongrie s'est déroulé le 11 avril [en anglais]. Le Fidesz, un parti de centre droit, a obtenu plus de 50 % des suffrages, s'assurant 206 sièges sur 386 au parlement ; le Parti socialiste hongrois revendique 28 sièges; Jobbik, un parti d'extrême-droite, a fait des gains significatifs, avec 26 sièges. Le deuxième tour de l'élection, où se décidera le sort des 121 sièges restants, est prévu le 25 avril.

La participation a été de 64,36 pour cent ; dans certains endroits, les électeurs ont dû patienter des heures avant de mettre leur bulletin dans l'urne. Eva S. Balogh de Hungarian Spectrum, qui vit aux USA, raconte la soirée électorale [en anglais] :

Eh bien, je croyais pouvoir donner des informations définitives sur les résultats des élections hongroises pour 14 heures (heure de la côte est), mais il y a eu pas mal de retard à cause des électeurs de dernière minute dans certaines circonscriptions. Je n'ai toujours aucune idée de ce qui s'est passé au juste, mais juste avant la fermeture prévue des bureaux de vote à 19 heures en Hongrie, de longues files d'attente se sont formées. Naturellement, les théories du complot pullulent. […]

Le problème était que les queues étaient si longues qu'ils étaient dans l'incapacité de voter pendant des heures après que les bureaux de vote auraient dû fermer, et la Commission Electorale nationale a décidé de prolonger le silence de la campagne électorale jusqu'à ce que tous les retardataires aient voté. La couverture de l'élection par les médias a été arrêtée, et la seule chose dont pouvaient parler les journalistes et leurs invités éminents était la décision de la Commission Electorale nationale. Enfin, quand à peu près 99% des bulletins avaient été comptés, la Commission a décidé de lever le silence sur la campagne. […]

Index.hu a rapporté (en hongrois) que les longues files d'attente résultaient d'une modification législative introduite par le premier ministre Gordon Bajnai en 2007, alors qu'il était Ministre des Municipalités et du Développement Régional. La nouvelle réglementation, plus stricte, a produit de plus grands nombres de participants dans les circonscriptions électorales de certaines grandes villes, parce que ceux qui souhaitaient voter ailleurs que dans leur bureau de vote attitré pouvaient en fait voter n'importe où en montant un document de contrôle. C'est pourquoi les circonscriptions électorales les plus fréquentées devaient faire face à un problème inédit : elles manquaient de temps et d'espace pour garantir que chacun pourrait voter avant la fermeture des bureaux de vote à 19 heures. Selon un compte-rendu (en hongrois), le dernier électeur a attendu son tour jusqu'à 1h15 du matin.

Pendant la soirée électorale, la télévision publique a diffusé en direct (en hongrois) des extraits de la réunion de la Commission Electorale nationale, l'interrompant pour des commentaires et des reportages en direct des bureaux de vote où attendaient encore des centaines de personnes. Un journaliste de la rue Bocskay annonça qu'il avait rencontré une équipe de télévision tchèque, ce qui ne tarda pas à devenir un thème tendance sur Twitter (en hongrois), citant l'invité, Gergő Süveges (en hongrois) au studio, qui disait que même les collègues de République Tchèque pouvaient arriver en Hongrie en moins de temps qu'il n'en fallait à la Commission Electorale nationale hongroise pour réussir à prendre une décision sur la publication des résultats au bout de plusieurs heures de discussion. Ce commentaire a rapidement fait de l'invité, un simple journaliste de la télévision publique, une personnalité médiatique.

Quelques groupes Facebook parodiques ont été promptement créés. L'un d'eux, par exemple, a été baptisé d'après la Commission Electorale Nationale (en hongrois), tandis qu'un autre portait ce nom : Le groupe qui atteindra les 10.000 membres avant les résultats des élections (en hongrois).

Tomi de Gombapresszó n'était pas au nombre de ceux qui ont dû patienter pour voter, mais cette journée électorale n'en a pas été moins mémorable pour lui : il n'y est pas seulement allé pour voter lui-même, mais aussi pour enregistrer la première participation de sa fille à une élection (en hongrois) :

Je pourrais dire que je me rappelle le jour où j'ai voté pour la première fois, mais à part quelques détails flous (descendre la rue Lénine avec mon père qui était en costume), il ne m'en reste que l'impression […] J'étais très fier de moi. Même le fait que les communistes organisaient l'événement ne me contrariait pas, bien qu'ils fussent connus pour ne pas être des parangons du libre choix. Mais je ne me rendais pas compte à l'époque que j'avais seulement été invité à être un “monsieur qui vote.”

L'élection de hier en était une vraie, et ma fille Liza en a reçu une attestation-souvenir.

Il était impossible de détecter en elle le moindre signe de fierté, même si j'ai essayé d'attiser ce sentiment en elle […]. Quoi qu'il en soit, j'ai enregistré l'événement – au cas où elle voudrait se rappeler cette journée, elle en aura le moyen. […]

Vers minuit, lorsque tout le monde connaissait les chiffres presque complets, Eva S. Balogh a publié ce commentaire sur les résultats du premier tour :

[…] Les résultats n'ont pas été une grosse surprise : le Fidesz a gagné avec 52.77% après le premier tour, ce qui se traduit par un total de 206 sièges sur un total de 386. Le Fidesz a donc atteint la majorité absolue. Le parti obtiendra-t-il la majorité très désirée des deux tiers, voilà qui reste encore irrésolu et incertain. Nous connaîtrons la réponse dans deux semaines, après le deuxième tour du vote, quand il y aura une finale dans toutes les circonscriptions où aucun candidat n'a reçu plus de 50% des suffrages.

Le MSZP a fini deuxième avec 19.29% des voix, suivi par le Jobbik avec 16.71%. Catastrophique. La performance du LMP a été étonnamment vigoureuse : 7.42%. Malheureusement ce n'est pas assez pour qu'il entre au parlement. Ibolya Dávid, président du parti, a aussitôt démissionné. Je pense que l'engagement du MDF aux côtés des restes du SZDSZ a été une grave erreur. Je regrette vraiment l'échec du MDF parce que je pense que la Hongrie a grandement besoin d'un parti authentiquement conservateur.[…]

Gábor Török, un analyste politique dont le blog (en hongrois) s'est rendu célèbre auprès des  internautes lorsque la campagne a démarré, a assisté à l'émission télévisée en direct mentionnée plus haut, et une fois rentré chez lui, il a publié un billet (en hongrois) donnant une analyse concise :

[…] Tableau général : L'élection de 2010 a amené un remarquable changement dans le système hongrois des partis: le problématique système bipartite antérieur a vacillé et s'est disloqué. Fidesz et KDNP ont gagné avec le plus fort pourcentage de voix depuis 1990, du côté de l'opposition ont émergé deux partis moyens et un petit étonnamment solide. Ajoutons que, concernant la participation au premier tour (64,3%), elle a été similaire aux trois élections précédentes (1990, 1994, 2006), mais la deuxième plus basse après 1998 – bien que plus élevée qu'on ne s'y attendait. […]

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