Cuba : Réactions à la mort par grève de la faim du blogueur Orlando Zapata Tamayo

Le 19 janvier a été un triste jour pour la blogosphère cubaine puisque les internautes ont appris la nouvelle de la mort du prisonnier Wilman Villar Mendoza, en grève de la faim depuis novembre dernier [en anglais]. De nombreux blogueurs ont comparé sa situation [en anglais] à celle d’ Orlando Zapata Tamayo, autre  prisonnier politique mort en  2010 et premier prisonnier politique cubain mort depuis 1972 des suites d’une grève de la faim.

Un blogueur cubain exilé a clairement  montré dans le blog Uncommon Sense [en anglais] la relation existante entre les deux cas :

La dictature de Castro a son sang sur les mains  comme il a celui d’Orlando Zapata et de Juan Soto.
Et à l’image de ces martyrs, il ne sera jamais oublié.

Il a aussi créé un lien renvoyant à une déclaration de la Coalition des femmes cubaines-américaines [anglais], qui donne plus d'informations sur ” la mort  du prisonnier politique Wilman Villar Mendoza et sur la réponse donnée suite à  cet évènement  par la dictature qui a conséquemment accentué la répression”.

De nombreux blogueurs à l’instar du blog Babalú ont aussi fait des commentaires sur la mort de Mendoza. Val Prieto montre que le dissident n’est pas seulement mort “en raison d’une privation de ses droits et libertés… mais en raison aussi de l’injustice et de l’avilissement dont il a été victime”:

Wilmar Villar Mendoza…qui menait une grève de la faim depuis 50 jours et protestait tant contre son incarcération que contre l’abjecte violation de ses droits et libertés fondamentales est mort hier des mains du gouvernement cubain. Il avait 31 ans.

C’est un héros qui est mort avec Wilmar Villar Mendoza. Non seulement parce qu’il a eu le courage de se lever par convictions contre ce Goliath qu’est le régime de Castro mais aussi parce qu’il s’est sacrifié avec stoïcisme et dignité.

Wilmar Villar Mendoza s’est sacrifié et est mort pour que 11 millions de ses compatriotes cubains puissent se libérer de la tyrannie qui l’a assassiné.

Alberto de la Cruz a partagé “un court instant de lumière ” à l’occasion de la mort de cet homme :

Comme ceci est arrivé lors des assassinats de Zapata Tamayo, de Soto et de Pollán, pendant un bref moment, l’assassinat de Wilmar Villar Mendoza a mis à bas la façade et les mensonges de la dictature de Castro, lesquels ont  pendant tant de décennies servi de bouclier.

Il se peut que cela ne dure pas longtemps — peut-être quelques heures ou quelques jours — mais pour l’heure, il a montré à tous ce qu’était le régime de Castro.

Demain peut-être, cet instant de lumière  se dissolvera et les mensonges reviendront submerger la vérité. Non pas tant en raison de la faiblesse de cette même clarté ou de la brièveté du moment mais parce que le monde fermera les yeux et tournera le dos à cette désagréable vérité. La mort de Wilmar Villar Mendoza n’est pour l’heure toutefois pas vaine: pendant un court instant, la lumière s’est faite à Cuba.

Le blog a continué de fournir des détails sur “la manière dont les militants pacifiques des Droits de l’Homme sur l’île sont descendus dans les rues pour honorer l’ultime sacrifice de Wilmar au nom de la liberté individuelle et politique à Cuba” et il a ajouté : “Ces manifestants se sont opposés aux forces de sécurité du gouvernement de Castro qui les ont attaqués et ont violemment appréhendés plusieurs d’entre eux.”

Sur le site Pedazos de la Isla, il est expliqué la raison pour laquelle Wilman Villar Mendoza ne doit pas être oublié :

J’ai entendu plusieurs personnes être d’avis que la grève de la faim était une forme de suicide mais je ne le crois pas. S’il est mort c’est de la faute de la dictature cubaine. C’est cette même dictature qui a arrêté Mendoza avec d’autres opposants en novembre alors qu’ils manifestaient de manière pacifique dans les rues de Contramaestre. Et c’est cette même dictature qui n’a fait aucun cas de ses demandes de libération, ce qui l’a conduit à protester. Ce n’est pas un suicide. C’est un assassinat. Je ne connaissais pas personnellement Wilman Villar Mendoza mais lorsqu’une personne met sa vie en danger pour défendre la liberté, cela en dit long. Ce jeune, qui laisse derrière lui une épouse et deux enfants en bas âge, s’ajoute à la liste de tous ceux déjà fusillés, torturés, frappés et morts des suites d’une grève de la faim. C’est un autre Orlando Zapata Tamayo, c’est un autre  Pedro Luis Boitel.

Les blogueurs se sont indignés aussi de la manière dont était traitée la famille de Mendoza. Le blog Pedazos de la Isla a fait observer que “nous n’oublierons pas non plus sa famille et son épouse qui, jusqu’aux derniers moments, n’a pas même été autorisée à voir le corps “, et@Yoani Sanchez a posté ce qui suit sur Twitter :

#cuba J’ai parlé avec Maritza, l’épouse de Wilmar Villar qui confirme sa mort. Ils ne lui ont pas laissé voir son corps. Pour plus d’information, téléphonez au +5353842338

Le blog  Notes from the Cuban Exile Quarter a déclaré :

Cette nuit, deux petites filles ont perdu leur père ; une jeune femme, son époux ; une mère, son fils. Wilmar Villar Mendoza est mort hier après que ses reins et d’autres organes aient lâché. Sa mort est la conséquence d’une grève de la faim prolongée et  causée par l’indignation qu’à générer la profonde injustice don til a été l’objet de la part du régime castriste.

Il a  aussi fait le commentaire suivant :

Il y a eu peu de couverture médiatique et peu de déclarations officielles concernant sa situation jusqu’à ce que sa mort ne devienne imminente.

Les Dames en Blanc ainsi que d’autres opposants et militants ont défilé et ont manifesté leur soutien. Il ont été victimes à cette occasion de brutalités et ont été arrêtés mais la presse internationale n’a rien dit. Maintenant qu’il est mort, et comme cela s’est produit lors de l’affaire Orlando Zapata Tamayo en 2010, les médias internationaux divulguent le fait. C’est un peu tard pour Wilmar Villar Mendoza. Bien avant, les blogueurs et militants avaient sur Twitter alerté le monde de sa situation.

Face à une dictature totalitaire brutale, il existe une équation très simple:
silence = violence = mort.

Lorsqu’il y a des protestations officielles au niveau international et que la presse plaide fortement en faveur de dissidents brutalement  traités, il y a alors moins d’effusion de sang. Ce silence a fait de Maritza Pelegrino Cabrera, l’épouse de Wilman, une veuve et de ses deux petites filles âgée de  5 et 6 ans, des enfants qui grandiront sans avoir de père à leurs côtés.

Babalú a publié et traduit une fracassante déclaration sur la mort de Mendoza rédigée par l’un des blogueurs les plus connus  de Cuba, Yoani Sanchez :

Je veux dénoncer le fait que dans mon pays les gens doivent, en guise de protestation citoyenne, livrer bataille avec leur corps et leurs tripes. Il est vraiment lamentable que toute une population –soit 11millions de Cubains sur cette île — ait vu tous les moyens citoyens, civiques, électoraux, juridiques pour tenter de changer les choses, d’exiger une transformation et la fin du statut quo en ce pays leur être ôtés, coupés ou limités. Alors que reste-t-il ?  Et bien, il ne reste aux gens qu’à recourir à la grève de la faim afin d’exprimer leur mécontentement. Ce qui s’est passé aujourd’hui, c’est-à-dire la mort de Wilmar Villar, est très triste.

C’est ce que je voulais dénoncer. C’est peut-être une bouteille lancée à la mer, un acte inutile mais en ce 19 janvier, je veux néanmoins témoigner de cela. De grâce, nous ne voulons pas continuer à nous servir de nous-mêmes pour protester. Nous devons avoir le droit de faire ceci sans avoir à  subir une répression.

La petite photo utilisée dans ce billet, “On black”, est celle de Funchye et a été utilisée sous une licence Creative Commons Attribution-NonCommercial-ShareAlike 2.0 Generic (CC BY-NC-SA 2.0). Visite el sitio en Flickr de Funchy

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