Comment mobiliser les citoyens du web en Guinée

 

Le Palais du peuple - Conakry, Guinée. CC BY 2.5

Le Palais du peuple – Conakry, Guinée. CC BY 2.5

Alimou Sow est l'un des bloggers les plus populaires en Guinée. Créateur du blog Ma Guinée plurielle, il est lauréat du concours du meilleur blog francophone organisé par la Deutsche Welle en 2013. 

La Guinée traverse une période difficile : le virus Ebola affecte le pays et le système sanitaire n'est pas à même de répondre aux besoins pressants. De plus, le pays a pris du retard dans l'implication des citoyens dans les avancées numériques et à l'inverse de ses voisins, les guinéens se mobilisent peu quand les crises humanitaires frappent.  Il vient de publier sur sa page Facebook un billet à l'occasion de la Journée internationale des blogs, le 31 aout 2014:

… comme chaque 31 août, c'est la journée mondiale du‪#‎Blog‬. Mais que s'est il passé sur la blogosphère guinéenne ? La Guinée-à t-elle une blogosphère ? Une twittosphere ? Ne sommes nous pas, comme très souvent des nombrilistes spectateurs passifs des convulsions du monde? Quelle est notre part du dividende de la citoyenneté sur le web ? Nous sommes un des rares pays – sinon le seul – de la sous région à n'avoir jamais pu organiser un ‪#‎BarCamp‬ ou un ‪#‎BlogCamp‬. Pendant ce temps chez nos voisins il existe des communautés structurées très dynamiques des net-citoyens qui se mobilisent spontanément à chaque événement important pour apporter une aide désintéressée à leurs concitoyens à travers les outils internet. C'est le cas actuellement en RCI et au Sénégal pour lutter contre l'épidémie d'Ebola que nous leur avons fourguée….

Puis, j'ai entrepris de partager mon expérience au sein de certaines universités et à travers la Maison de la presse de Guinée. A quelques rares exceptions, j'ai globalement rencontré des gens indécis, démotivés, désarticulés et désorganisés…  En vérité, nous Guinéens, nous nous sommes laissés avoir par la politique et l'ethnocentrisme en oubliant nos terribles ennemis communs que sont: l'ignorance, le chômage, la pauvreté et les maladies. Nous pouvons toujours continuer à demander de l'aide à Dieu, mais au vu de ce dont IL nous a déjà gratifié (un pays immensément beau et riche, une diversité ethnique et culturelle, etc.) je crains qu'Il ne soit lassé vu son agenda dans les autres contrées du globe: Palestine, Ukraine, Ebola, Irak, Libye, Syrie…

 Plusieurs commentaires sont venus étayés la discussion sur l'état de la blogosphère guinéenne. Morceaux choisis :   

Alfa Diallo pense aussi que la Guinée accumule un retard important sur le web  : 

 Particulièrement touché par ces vérités. Mais, moi je pense que vous êtes sur la bonne voie. La formation est l'élement qui manque à la chaine. En Guinée, même ceux qui ont des choses à dire ou à montrer ont un serieux handicap: la non maitrise des outils du web. J'ai participé à une seule séance de votre formation à la MDP, mais croyez moi j'ai baucoup appris. Courage!!!

Tafsir Balde est touché par les mots de son concitoyen et affirme que les Guinéens doivent se responsabiliser, spécifiquement sa diaspora (Balde est résident au Maroc) : 

 Très profondément touché par ces réalités. Tu a frappé fort cher Alimou Sow. Au faite, moi je trouve que ce retard n'est pas toujours du côté de la Guinée, mais du guinéen en quelque sorte (sauf quelque uns). Au Maroc ici, des jeunes guinéens talentueux y sont, mais pas tellement branchés dans la blogosphère. Je ne connais qu'un seul mondoblogeuer guinéen ici (Kba), si non, le reste, ce ne sont que des simples internautes. J'ai représenté la Guinée et l'Afrique en général dans pas mal d'événements web ici au Maroc; ou j'étais le seul participant sub-saharien!… 

Thierno Diallo  pense que certains blogueurs sont capables de faire avancer l'engagement civique numérique sur le web en Guinée mais qu'il faut s'organiser : 

Bonjour Alimou, debut août j'ai profité de mon séjour à Labé pour parler de ce triste constat avec Bilaly. On a même dressé la liste (non exhaustive) des personnes qui se sont montrées aptes (par leur civisme) à faire partie de cette organisation ; en plus de ceux que tu as mentionnés dans la publication il y a Aguibou Ramadane et Ousmane Tanou….

Tu sais autant que les autres blogueurs que nous ne pouvons pas être manipulés comme les jeunes qui soutiennent aveuglément l'un ou l'autre camp en échange de quelques billets de banque, sans se soucier de l'intérêt de la Nation. 

Mamadou Aliou Balde pense qu'une des raisons de ce manque d'engagement peut être imputé aux difficultés des Guinéens à maitriser la langue française :  

Félicitation Mr Sow. Je suis un des vos lecteurs assidus. Sans démagogie ,j'ai un grand respect pour votre plume [..]  J'ai commencé à pratiquer la langue de Molière qu'à l'age de 14 ans. Je sais combien, des fois, écrire et parler français est difficile pour les jeunes guinéens. Je pratique l'école guinéenne depuis plus de 20 ans en tant que promoteur d'école et enseignant. Je sais combien, des fois, notre éducation est au rabais. Intéresser les jeunes guinéens à l'écriture est un vrai parcours de combattant. 

Ce débat résume bien les nombreux handicaps de la blogosphère guinéenne. Ils manquent de préparation en français, la langue de communication qu'ils utilisent le plus régulièrement dans l'écrit. Ils agissent individuellement dans un environnement pauvre où ils doivent relever chaque jour de nombreux défis dont l'accès régulier aux services de base dont Internet. 

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