Italie : Le tremblement de terre de L'Aquila, c'était il y a trois ans

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Comme l'indiquent encore les horloges des nombreuses églises et clochers au centre de L'Aquila, à 3 heures 32 le matin du 6 avril 2009, un tremblement de terre de magnitude 6,3 a brisé le silence de la ville endormie et détruit les vies de beaucoup de ses habitants. Pour commémorer le troisième anniversaire du tragique événement, les citoyens se sont rassemblés pour s'entraider et se souvenir, de nombreuses pages Web ont été créées pour raconter et commenter le tremblement de terre et ses effets profonds.

Orologio fermo a L'aquila, 6 aprile 2009

L'horloge de l'église s'est arrêtée à 3h32 le 6 avril 2009 à L'Aquila. Photo StazioneMIR, licence Creative Commons BY-NC-ND 2.5

Les visites officielles et commémoratives à la ville n'ont pas fait défaut ; pleine de signification pour de nombreuses personnes a été la présence de M. Fabrizio Barca, le ministre de la “Cohésion territoriale” [le bureau italien créé en 2011 pour coordonner les actions des gouvernements locaux et soutenir l'infrastructure politique, dans le centre-sud de l'Italie], qui a manifesté une préoccupation particulière pour la situation de L'Aquila et pour la transparence dans le processus de reconstruction – dans une grande tristesse et un vif chagrin, une exigence de justice et des garanties pour la reconstruction.

Ces derniers jours, beaucoup d'internautes ont confié sur Twitter, (#laquila#terremoto#laquilapernoi#6 avril) leurs souvenirs et leurs réflexions, exprimant leur solidarité avec la population de L'Aquila. Les références les plus fréquentes dans ces tweets concernaient une conversation téléphonique interceptée le lendemain du séisme, dans laquelle deux hommes d'affaires plaisantaient sur l'événement, savourant avidement les bonnes affaires qu'ils allaient faire dans la construction et la reconstruction. Dans cette courte vidéo, vous pouvez entendre un extrait de la conversation.

@ermeneleutico a dédié quelques vers à la ville :

Buonanotte l'Aquila / riempita di promesse / usata e abbandonata / per meschino interesse

Bonsoir L'Aquila / pleine de promesses / utilisée et abandonnée / pour des intérêts égoïstes et mesquins.

Alors que Marta Torres témoigne sa solidarité avec la population de la ville de L'Aquila et de la région des Abruzzes :

Non dimentico mai #laquila, città distrutta il #6aprile. VERGOGNA k sia ancora una città fantasma. Tutti il mio affetto al popolo abruzzese ♥

Je n'oublierai jamais #laquila, ville détruite le #6aprile. Dommage qu'elle soit toujours une ville fantôme. Toute mon affection pour les gens des Abruzzes ♥

@Bebo1936 raconte son expérience d'il y a trois ans :

Tre anni fa ero a scappare per la violenta scossa di #Earthquake all’#aquila#Abruzzo

Il y a trois ans je cherchais à fuir de la violente secousse du  #Earthquake (tremblement de terre) à l’#aquila#Abruzzo

Et @DaniDBJ d'ajouter :

L'Italia che quella notte non rideva, oggi non dimentica.. #6april#laquila

L’Italie n'a pas ri cette nuit-là, aujourd'hui, elle n'oublie pas .. #6april#laquila

Enfin, @liv_77 décrit ici comment il n'y a pas encore eu de véritable retour à la normale pour les habitants de L'Aquila :

Da 3 anni, ahimè, guardo il sito di INGV -@INGVterremoti#laquila

Pendant 3 ans pauvre de moi, j'ai regardé le site web -@INGVterremoti#laquila
L'Aquila, 5 April 2012: downtown procession (photo from wired.it)

L'Aquila, 5 Avril 2012: défilé au centre-ville (photo de wired.it)

De nombreuses initiatives ont été lancées pour sauvegarder la mémoire de l'événement. Une vidéo réalisée par Shoot4Change et ANPAS a recueilli des voix, des images et des reportages en direct, pour créer un espace de partage collectif et pour la mémoire.

 Move Productions et Al Jazeera en anglais ont produit un documentaire intitulé “Ritorno a L'Aquila” (Retour à L'Aquila), qui a été retransmis aujourd'hui par des centaines de chaînes de télévision Internet, coordonnées par le réseau Altratv.tv avec Tiscali comme fournisseur d'accès Internet.

En outre, le 15 avril, le magazine en ligne Wired.it a lancé une campagne dans le but de maintenir l'attention sur l'urgence à L'Aquila à un niveau élevé afin de discuter publiquement les projets de reconstruction et la renaissance de la ville. À cette fin, il y a également eu un barcamp organisé sur la place centrale du Duomo. Pour plus d'informations et de mises à jour sur l'organisation de ces événements, vous pouvez suivre le hashtag #occupylaquila sur Twitter.

Le groupe collective 3:32, constitué dans les semaines qui ont suivi le tremblement de terre, a publié sur son blog une longue réflexion sur les événements les plus pertinents pour caractériser les trois dernières années à L'Aquila :

Il terremoto del 2009 è stato senza dubbio una catastrofe; e quindi, come qualsiasi catastrofe nella storia dell’evoluzione del mondo, ha distrutto delle cose, delle forme di vita, ma ne ha fatte sorgere delle altre. Anzi, la sfida della ricostruzione è riuscita ad attivare dei processi di incontro e comunicazione tra le persone che prima sembravano impossibili. […] Più che restaurata, o semplicemente ricostruita, la nostra città deve essere rifondata. Battersi per L’Aquila oggi significa in primo luogo opporsi alle speculazioni edilizie e all’ulteriore consumo di suolo e territorio. […] La nostra è certamente una lotta territoriale, con la sua identità e le sue specificità, ma è anche una lotta per un modello complessivo fatto di politica trasparente, di decisioni realmente democratiche e partecipate, di rispetto  del patrimonio ambientale e culturale e sviluppo eco-sostenibile.

Le tremblement de terre de 2009 a été sans aucun doute catastrophique; et comme toute catastrophe dans l'histoire et l'évolution du monde, il a détruit beaucoup de choses, il a détruit de nombreux êtres vivants, mais il a cédé la place à de nouvelles créations. Le défi de la reconstruction a activé certains canaux de communication qui auraient semblé impossibles avant . […] Plus que restaurée, ou tout simplement reconstruite, notre ville doit être refondée. Lutter pour L'Aquila aujourd'hui signifie, en premier lieu, s'opposer à la spéculation immobilière et à la poursuite des achats des sols et terrains […] Notre combat est certainement un combat territorial, avec son identité et ses particularités mais c'est aussi un combat pour un modèle politique totalement transparent. Un modèle véritablement participatif dans lequel de vraies décisions démocratiques sont faites, dans lequel notre patrimoine environnemental et culturel est respecté et soutenu.

Les voix officielles n'ont pas manqué non plus, comme celle de Stefania Pezzopane, conseillère pour la culture à L'Aquila, qui sur le site Web d'informations Articolo21.org a écrit:

Il 6 aprile resta una data diversa dalle altre perché sono passati più di mille giorni e sentiamo sulle nostre vite il peso di una precarietà e di un disorientamento che persistono. La nostra città è ancora deserta, ferita, priva di quella vita pulsante che era, poi, la quotidianità di ciascuno di noi. […] Questo non è un giorno normale proprio perché, a fianco al lutto che è impresso come una ferita nei nostri cuori, ci stupiamo della nostra forza e della speranza che ancora riusciamo a donare allo sguardo con cui cerchiamo di abbracciare il futuro.

Le 6 avril reste une date qui est différente de toutes les autres. Aujourd'hui, plus de 1000 jours après cette date, nous sentons encore le poids de l'imprévisibilité et d'une désorientation persistantes. Notre ville est toujours déserte, blessée, privée de sa vie animée, qui marquait aussi le quotidien de chacun de nous. […] Cette date n'est pas une journée normale précisément parce que, à côté du deuil qui est marqué comme une plaie dans nos cœurs, nous nous surprenons constamment de notre force et de notre espérance que nous réussissions encore à donner au regard avec lequel nous cherchons à embrasser l'avenir.

En marchant dans les rues de la ville et ses quartiers environnants, on se rend compte que, à L'Aquila le traumatisme est toujours présent et visible, mais plus fort est encore le ressentiment de ces familles qui ne verront plus jamais leurs maisons, de ceux qui se sentent abandonnés et qui croient que rien n'a été assez fait, que, depuis trois ans, rien (ou presque rien) n'a changé: les débris et les décombres entassés dans les rues du centre-ville, des maisons fissurées et des palais éventrés constituent le paysage urbain qui attend les touristes dans le joyau médiéval des Abruzzes.
Des milliers de personnes ont été blessées et 309 personnes sont mortes, dont beaucoup étaient des étudiants qui étaient venus de toute l'Italie étudier à l'université de L'Aquila.

L'Aquila still resisting. Photo by Abruzzo Indymedia under a Creative Commons BY-SA 2.5 License

L'Aquila résiste toujours. Photo Abruzzo Indymedia sous licence Creative Commons BY-SA 2.5

La tragédie de L'Aquila, n'a pas concerné seulement la  perte de vies humaines suite au tremblement de terre: il y a eu beaucoup d’enquêtes judiciaires (dont certaines sont encore en cours) concernant la gestion des urgences, la responsabilité découlant du choix des matériaux de construction et la praticabilité de certains édifices (en particulier, ceux à usage public, comme la résidence universitaire), et les lobbies et autres groupes mafieux intéressés à percevoir une partie des fonds alloués à la reconstruction de la ville et de toute la région sismique.

Après la triple catastrophe (tsunami, tremblement de terre, risque de fusion nucléaire) qui a eu lieu au Japon il y a un an, des comparaisons ont pu être faites entre Fukushima et L'Aquila, pour souligner les différences d'approche des experts des deux pays quant aux prévisions et aux interprétations scientifiques des données sur les tremblements de terre.

Quelques mois après le battage médiatique qui a suivi le séisme, quand L'Aquila avait acquis une (triste) notoriété internationale, les projecteurs se sont éteints et, trois ans après la tragédie, il y a encore beaucoup de travail à faire pour redonner à la ville et à sa communauté la vie d'antan.

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