Sexualité débridée, l'image de la femme brésilienne dans le monde ?

[Liens en portugais] Lors de l'émission de télé “Justice Aveugle?”, de la RTP (Radio Télévision Portugaise), le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats du Portugal, Marinho Pinto, a déclaré que “l'une des choses que le Brésil avait le plus exporté au Portugal c'était, entre autres, des prostituées”.

L'affirmation fut faite lors d'un commentaire sur le cas de Catarina Migliorini, une Brésilienne qui avait vendu sa virginité pour quelques 600 000 euros à Natsu, un chef d'entreprise japonais. Marinho Pinto affirme que le gouvernement “accuse la jeune femme de prostitution”, alors qu'en fait, le Procureur général de la république souhaite accuser l'organisateur de “Virgins Wanted” de trafic d'êtres humains et de prostitution.

Suite à la déclaration de Pinto, les réactions indignées n'ont pas manqué sur  Facebook et Twitter sous le mot-clé #justicacega. Le mur Facebook du Ministère des Relations extérieures du Brésil est plein de messages sollicitant une prise de position de la part de l'Itamaraty (NdT: Le “Quai d'Orsay brésilien”) ainsi que des associations d'immigrants et de féministes.

La Casa do Brasil de Lisboa (CBL) la Maison du Brésil, conjointement avec l'association Lusophonie, culture et citoyenneté (ALCC), l'association ComuniDária et l'Union des femmes alternatives et réponses (UMAR), ont fait paraitre un désaveu:

A infeliz perpetuação desta imagem redutora e hipersexualizada da mulher brasileira, através de pessoas que ocupam cargos de responsabilidade, como o Dr. Marinho Pinto, tem implicações graves para a vida de cada uma das brasileiras vivendo em Portugal. São frequentes os casos de assédio sexual, discriminação no emprego e na vida social, bem como dificuldades no acesso ao alojamento e interrogatórios abusivos nos aeroportos e nas esquadras de polícia.

La triste immuabilité de cette image réductrice et hyper-sexualisée de la femme brésilienne, soutenue par des personnes qui occupent des postes à responsabilités, tel que le Dr. Marinho Pinto, a des conséquences graves sur la vie de chacune des Brésiliennes vivant au Portugal. Les cas de harcèlements sexuels sont fréquents, ainsi que les discriminations à l'embauche et dans la vie de tous les jours, tout comme les difficultés rencontrées dans l'accès au logement et les interrogatoires abusifs dans les aéroports et les commissariats de police.

Le Secrétariat aux politiques pour les femmes, le cabinet de conseillers de la Présidence de la République pour la formulation et la coordination des politiques en faveur des femmes brésiliennes, a réagi en informant que l'ambassadeur du Brésil à Lisbonne avait déjà exprimé au Bâtonnier de l'Ordre des Avocats, l'indignation du gouvernement brésilien quant à la déclaration proférée.

Dans une note, Marinho Pinto dit que les répercutions à propos de sa déclaration “ont choqué uniquement parce qu'elles sont vraies” et soutient que son commentaire était à destination des prostituées brésiliennes victimes de la traite des femmes au Portugal.

Busca no Google pelo termo mulheres brasileiras em inglês reflete o estereótipo sofrido pelas brasileiras

Une simple recherche Google avec les termes “femmes brésiliennes” en anglais, reflète le stéréotype subi par les Brésiliennes.

La déclaration de Marinho Pinto ravive la polémique sur l'image de la femme brésilienne de par le monde. Les thèmes du Carnaval et de la plage, où l'on voit des femmes à moitié nues, sont communs pour représenter les Brésiliennes.

“Les journalistes, et les médias étrangers d'une manière générale, ont pris pour habitude de présenter au monde la Brésilienne, avec une dose indiscutable de malveillanc, un excès de préjugés et une généralisation excessive”, dénonce  un article de Katia Belisário, professeur à la Faculté de Communication de l'Université de Brasília et doctorante en journalisme et société, pour l'Observatoire Média & Politique :

Representações estereotipadas e preconceituosas por parte da imprensa podem gerar consequências nefastas, tanto para a imagem da brasileira no exterior, quanto para o Brasil como um todo.

Les représentations stéréotypées et pleines de préjugés de la part de la presse peuvent générer des conséquences néfastes, tant pour l'image de la Brésilienne à l'étranger, que pour le Brésil dans son ensemble.

Sur son blog, la Brésilienne Melissa Rossi raconte [en anglais] son expérience en Italie et la manière pleine de préjugés dont les médias locaux traitent ses compatriotes:

Je n'ai jamais lu un seul article dans la presse italienne qui ne salisse  l'image de la femme brésilienne, faisant souvent appel à des stéréotypes offensants, qui les dépeignent comme étant jolies mais stupides.

Performance "Carimbada" da designer gráfica Janaína Teles: "utilizo o carimbo como objecto que taxa e marca outros corpos como a si mesmo (...) testemunha de um auto reconhecimento desta mulher marcada e estereotipada, abrindo possibilidades de processos de resignificação de identidades."

Performance “Tamponnée” de la designer graphique Janaína Teles sur le blog Corpo des-mapeado: “j'utilise le tampon comme un objet qui asservit et marque d'autres corps comme soi-même (…) le témoignage d'un acte de reconnaissance de cette femme marquée et stéréotypée, ouvrant des possibilités de processus de re-signification d'identités.”

En février de cette année, Claudia M. Vieira, avocate et professeure de Maîtrise en droit international de l'Université de Lisbonne, écrivait sur le site Sair do Brasil (Sortir du Brésil) à propos des effets des préjugés et de la discrimination qui existe contre la femme brésilienne à l'étranger:

É tão grave a situação que as próprias mulheres brasileiras  estão mudando o comportamento.  As que ja vivem mais tempo fora do Brasil,  já nem sorriem naturalmente, não brincam, não usam as roupas que gostam, tudo isso, por medo de sofrer preconceito. No curso de Mestrado da Universidade de Lisboa, constatei algumas alunas, falando com o sotaque português para serem aceitas, com a desculpa de que assim eles, os portugueses as entendiam melhor.

La situation est si grave que les femmes brésiliennes sont en train de changer de comportement. Celles qui vivent depuis plus longtemps loin du Brésil, ne sourient déjà plus si naturellement, ne plaisantent pas, ne mettent pas les vêtements qu'elles aiment, tout ça, par peur de ces préjugés. Dans les cours de maîtrise à l'Université de Lisbonne, j'ai constaté que certaines étudiantes parlaient avec l'accent portugais pour être acceptées, avec l'excuse que de cette manière, eux, les Portugais, les comprenaient mieux.

En septembre 2011, déjà, Mariana Selister, écrivant une thèse de doctorat sur la représentation de la femme brésilienne dans les médias sociaux portugais, a lancé le Manifesto Mulheres Brasileiras (@MBrasileiras), en signe de désaveu aux préjugés contre les femmes brésiliennes au Portugal :

O estigma da hipersexualidade remonta aos imaginários coloniais que construíam as mulheres das colônias como objetos sexuais, escravas sexuais, e marcadas por uma sexualidade exótica e bizarra. Cita-se, por exemplo, a triste experiência da sul-africana Saartjie Baartman, exposta na Europa, no século XIX, como símbolo de uma sexualidade anormal. Em Portugal, esses imaginários coloniais, infelizmente, ainda são reproduzidos pela comunicação social.

Le stigmate de l’hyper-sexualité remonte aux imaginaires coloniaux qui avaient érigé les femmes des colonies en objets sexuels, en esclaves sexuelles, marquées par une sexualité exotique et “bizarre”. On peut citer en exemple, la triste expérience de la sud-africaine Saartjie Baartman, exposée en Europe, au XIXè siècle, comme symbole d'une sexualité anormale. Au Portugal, ces imaginaires coloniaux sont malheureusement encore reproduits par la communication sociale.

Elle lance un appel toujours urgent et actuel:

Exigimos, das autoridades competentes, que se faça cumprir a “CEDAW – Convenção para a Eliminação de Todas as Formas de Discriminação Contra as Mulheres”, da qual tanto Portugal, como o Brasil, são signatários. Destacamos, também, o “Memorando de Entendimento entre Brasil e Portugal para a Promoção da Igualdade de Gênero”, no qual consta que estes países estão “Resolvidos a conjugar esforços para avançar na implementação das medidas necessárias para a eliminação da discriminação contra a mulher em ambos os países”.

Nous exigeons, des autorités compétentes, que l'on fasse respecter la “CEDAW – Convention pour l’Élimination de Toutes les Formes de Discrimination Contre les Femmes”, dont le Portugal, tout comme le Brésil, sont signataires. Nous attirons aussi l'attention sur le “Memorandum d'Entente entre le Brésil et le Portugal quant à la promotion de l’Égalité des Genres”, dans lequel il est dit que ces pays sont “Résolus à conjuguer leurs efforts pour avancer dans la mise en oeuvre des mesures nécessaires en vue de la disparition de la discrimination subie par les femmes dans les deux pays”.

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