Gambie : Procès secret, peines capitales et à perpétuité pour les militaires putschistes

Modou Njie, l'un des soldats gambiens qui ont été reconnus coupables par un tribunal secret. Il est condamné à mort. Photo utilisée avec la permission de Kibaaro News.

Modou Njie, l'un des militaires gambiens reconnus coupables par un tribunal secret. Il est condamné à mort. Photo utilisée avec la permission de Kibaaro News.

 Le 30 décembre 2014, un groupe de militaires mécontents a tenté contre le gouvernement de M. Yahya Jammeh un coup d'Etat [fr] déjoué par les forces loyales au président de la Gambie. L'attaque, avant l'aube contre la State House, a été conduite par le lieutenant Lamin Sanneh, un déserteur de l'armée, et ancien commandant du bataillon de la garde présidentielle. Le Lt. Sanneh et deux de ses collègues ont été tués [fr] dans l'attaque tandis qu'un autre (le soldat de première classe Modou Njie, à présent condamné à mort) avait été capturé.

Plus tard, deux Gambiens-Américains ont été accusés [fr], en vertu de la Loi de neutralité, pour leur implication présumée dans le coup raté. Cherno Njie, 57 ans, un homme d'affaires américain d'origine gambienne vivant à Austin, Texas, et Papa Faal, 46 ans, qui a la double nationalité américaine et gambienne, de Brooklyn Center, Minnesota, ont été inculpés “pour leur rôle dans une récente tentative de coup”, a déclaré le Département de la justice américain dans un communiqué. Les deux hommes se seraient rendus en Gambie dans le cadre du coup d'Etat, mais avaient fui pour retourner aux États-Unis via le Sénégal.

Les autorités de Banjul ont maintenant confirmé la condamnation d'au moins six militaires à des peines allant de la mort à la prison à perpétuité. Les peines ont été prononcées par une cour martiale secrète constituée peu après le coup d'Etat avorté le 30 décembre 2014. Les soldats et officiers ont été jugés sur un certain nombre de charges dont la trahison et les infractions liées à la mutinerie.

Selon les informations des services de la Radio Télévision de la Gambie (GRTS), le lieutenant-colonel Sarjo Jarju et le soldat de première classe Modou Njie sont condamnés à mort [fr] alors que le capitaine Abdoulie Jobe, le capitaine. Buba Bojang, le lieutenant Amadou Sowe et le capitaine Buba Sanneh ont tous été condamnés à perpétuité. Le directeur du ministère public, SH Barhourn, a dirigé l'équipe de l'accusation alors que les accusés étaient représentés par deux avocats anonymes de l'Agence nationale pour l'aide juridique (NALA).

Les groupes de défense des droits de l'homme ont exprimé leurs préoccupations [fr] sur la régularité du procès et ont demandé au gouvernement gambien de ne pas exécuter les sentences immédiatement. En 2012, le gouvernement avait exécuté neuf des 42 détenus condamnés à mort [fr] à l'époque, commuant les autres en un moratoire de 29 ans. Toutefois, le président Yahya Jammeh [fr] est ensuite allé à l'encontre d'un “moratoire conditionnel” sous la pression nationale et internationale.

La Gambie a suspendu sa participation au mécanisme d’Examen Périodique Universel de l'ONU. Amnesty International note que le gouvernement de la Gambie n'a accepté que 93 des 171 recommandations à l'Examen périodique universel à Genève.

En novembre 2014, l'Organisation des Nations Unies a déclaré que deux de ses experts en droits de l'homme avaient été contraints de suspendre une partie entière de leur visite en Gambie quand ils se sont vu refuser l'accès à certaines parties de la prison et ont été empêchés de terminer une enquête sur des cas de torture et de mort pendant le premier voyage jamais effectué dans ce pays par une telle équipe d'enquête indépendante, selon un communiqué de presse du bureau des droits de l'ONU.

“Les condamnations à la peine capitale prononcées contre des soldats accusés d’avoir participé à la tentative de coup d’État de décembre dernier en Gambie sont une atteinte cruelle au droit à la vie et au droit à un procès équitable”, a dit [fr] Amnesty International.

“Le système gambien de justice présente de graves déficiences et l’équité de ce procès nous inspire des doutes étant donné qu’il s’est tenu en secret. Amnesty International demande que les condamnations à mort soient commuées en peines d’emprisonnement, en attendant l’ouverture d'un nouveau procès respectant les normes internationales d'équité en la matière sans que la peine de mort ne puisse être requise” a-t-elle noté.

Commentant la déclaration d'Amnesty International sur Facebook, Ebrima Manneh a déclaré [lien inaccessible] :

La déclaration d'Amnesty International a tout dit. Dans un système de justice imparfaite, un verdict est toujours douteux surtout dans un procès fait en secret. La communauté internationale doit agir rapidement et sévèrement contre ce régime qui continue terroriser ses citoyens.

Un porte-parole du Haut Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme, Rupert Colville [fr], a exprimé la profonde préoccupation de son organisation pour les peines de mort. “Nous espérons que les six détenus seront autorisés à faire appel, comme c'est leur droit, et nous appelons le gouvernement gambien à maintenir son moratoire sur l'application de la peine de mort”.

Commentant la réaction de l'ONU, Kairo, lecteur du site d'information Karamo, a demandé à l'ONU d'être plus énergique avec le président Jammeh, qui est au pouvoir depuis plus de 20 ans :

l'ONU devrait être plus directe et énergique avec le régime de Jammeh. Ce n'est pas la première fois qu'il envoie des innocents à la mort sans aucune raison valable. On doit lui faire comprendre qu'il n'est qu'un être humain d'une manière ou l'autre pour commencer. Le peuple gambien a besoin de l'aide extérieure pour se libérer de Jammeh. Que Dieu les aide …

Se demandant comment un procès d'une telle importance a pu être tenu en secret, Malick Njie a écrit sur le site d'informations gambien en ​​ligne JollofNews :

La Gambie est un pays intéressant. Comment se fait-il qu'un procès vital comme celui-ci soit tenu par une cour martiale à huis-clos ? Puisse Allah sauver le peuple de ce grand pays du monstre Yahya Jammeh … ..

Un autre lecteur du même site, Maxs, a dit que les sacrifices désintéressés de ceux qui combattent la dictature en Gambie seront honorés et rappelés :

L'entreprise criminelle de Banjul devrait être éliminée par tous les moyens nécessaires. Les soldats innocents doivent être libérés. Alors que la plupart des Gambiens continuent à approuver la dictature par le silence complet et le non-engagement dans le sauvetage du pays, ceux qui sacrifient leurs vies et leurs familles à la cause de la liberté seront toujours dans nos mémoires comme de véritables fils et patriotes de la Gambie. Leurs sacrifices altruistes seront honorés dans la Côte Souriante [surnom de la Gambie] dans un avenir très proche.

Amadou Maneh a commenté :

Personne ni aucun endroit ne mérite Jammeh. Je parie que même l'enfer devra être forcé à le recevoir.

Sur Twitter, Sam Phatey a simplement demandé:

Est-ce que l'armée de la # Gambie veut nous dire qu'une cour martiale secrète a fait un procès libre et équitable ? J'ai peur d'une reprise des exécutions, grave !

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