Les Ethiopiens ne doivent pas attendre que les USA leur offrent la démocratie

Barack and Michelle Obama greet Ethiopian PM Hailemariam Desalegn and  Ms. Roman Tesfaye at a U.S.-Africa Leaders Summit in 2014. Official White House Photo by Amanda Lucidon, released to public domain.

Barack et Michelle Obama avec le premier ministre éthiopien Hailemariam Desalegn et Roman Tesfaye lors du Sommet Etats-Unis – Afrique en 2014. Photo officielle de la Maison Blanche  par Amanda Lucidon, domaine public.

Barack Obama a est devenu le premier Président américain en exercice à visiter l'Éthiopie et à y prononcer un discours [fr] devant les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union africaine.

L'annonce de la visite de M. Obama en Ethiopie a été dénoncée par les défenseurs des droits humains qui ont fait valoir que c'était trop d'honneur pour le gouvernement éthiopien, engagé depuis longtemps dans une répression contre les travailleurs des médias locaux avec des dizaines d'arrestations et des peines de prison de plusieurs années, y compris l'emprisonnement de six membres de la communauté Global Voices. Le parti au pouvoir a également remporté 100% des sièges du parlement aux élections de mai 2015, provoquant les soupçons des Ethiopiens que les autorités avaient interféré avec le processus électoral.

La déception et la colère n'ont commencé à faiblir qu'après la libération de plusieurs blogueurs et journalistes avant l'arrivée du président Obama.

President Barack Obama and Ethiopia Prime Minister Hailemariam Desalegn hold a press conference at the National Palace

Conférence de presse de Barack Obama et du premier ministre Hailemariam Desalegn au Palais National. Photo de la Maison Blanche, domaine public.

Au cours de sa visite, le président Obama et le Premier ministre éthiopien Desalegn ont été rejoints à un dîner officiel par des personnalités éthiopiennes de premier plan, artistes, sportifs et hommes politiques. Cependant, le chef de l'Ethiopian Blue Party, Yilikal Getnet a décliné l'invitation [fr] à dîner, disant que “cela reviendrait à prendre part à un dîner de luxe tandis que des millions d'Ethiopiens souffrent.”

Contrarié par le soutien du Président Obama au gouvernement éthiopien, M. Jawar Mohammed, un avocat de premier plan dans le contentieux Ethiopie-Oromo, a écrit sur ​​Facebook :

Maintenant, les États-Unis appuient fermement et officiellement l'autoritarisme en Ethiopie

Quand on analyse les déclarations des responsables américains Donald Booth (ancien ambassadeur en Ethiopie qui a dit que l'élection de 2010 avait été assez bonne), Wendy Sherman (secrétaire d'État adjoint), Susan Rice (conseillère à la sécurité nationale) et maintenant du Président Obama qui, dans son discours a déclaré deux fois que le régime avait été démocratiquement élu, nous arrivons à la conclusion que les États-Unis [ont] décidé de soutenir publiquement le régime autoritaire éthiopien, tant en paroles qu'en actes. Les États-Unis ont toujours soutenu ce régime dans la pratique, à travers une aide massive, toutefois, l'administration de George Bush, avait gardé verbalement un ton critique sur la nature autoritaire du régime. Cette réserve des USA s'est émoussée maintenant que l'administration Obama a officiellement et ouvertement approuvé le discours “de la dictature du développement”. Pourquoi donc ?

1) Somalie : après que la tentative de remplacer l'Ethiopie par le Kenya et l'Ouganda comme outils d'intervention dans les affaires intérieures de la Somalie est resté sans résultats, l'Amérique revient maintenant à la vieille tactique de compter pleinement sur l'armée et les services de renseignement éthiopiens.

2) Chine : Alors que les Etats-Unis dépendent de plus en plus de l'Ethiopie pour la protection de leurs intérêts sécuritaires, la Chine a développé une influence inégalée dans l'économie de ce pays. William Davison a bien résumé cette réalité dans son dernier article, en écrivant “Quand Barack Obama est devenu le premier Président des États-Unis en fonction à atterrir dans la capitale éthiopienne dimanche soir, il était dans un aéroport restructuré à l'aide d'un prêt chinois de 250 millions de dollars. Son convoi s'est alors engagé sur une autoroute urbaine à six voies, également financée par la Banque Export-Import de Chine, jusqu'à la Place Meskel, où  se croisent deux lignes d'un nouveau chemin de fer électrique de construction chinoise. Surplombant le sud-ouest de la capitale, il peut avoir repéré le siège de l'Union africaine, un cadeau à 200 millions de dollars des dirigeants chinois “.

Un tel investissement donne à la Chine une influence notable non seulement sur l'Ethiopie, mais aussi sur le reste du continent par le biais de l'Union africaine qui s'y trouve.

Réagissant à cette analyse de M. Jawar, Amin Kedir a conseillé :

Il ne faut pas dépendre de l'étranger pour apporter le changement, la justice, la démocratie, etc. dans vos problèmes internes. M. Obama vient pour ses propres intérêts (pour le bénéfice de son pays), ne vous attendez pas plus de changements de M. Obama.

Kedir Tibeso n'attend pas beaucoup de M. Obama non plus :

Les dictateurs restent des dictateurs, et l'Amérique veut l'Ethiopie pour ses propres intérêts. Je ne m'attends rien d'Obama.

Souscrivant aux arguments de M. Jawar, Mohammed Siraj a écrit :

Excellente analyse. Ceux qui attendaient depuis longtemps que l'Amérique les libère, doivent savoir que l'Amérique [est un] pays pragmatique qui poursuit ses propres intérêts. C'est une bonne occasion de rester calmer et de penser au chemin sans issue parcouru depuis si longtemps.

Le problème ne réside pas en M. Obama, mais en l'absence d'un mouvement d'opposition unie, fondée sur l'idéologie plutôt que les tribus, a relevé Abo Ethio :

Tant que l'opposition ne sera pas unie pour montrer sa force (tangible), les Etats-Unis continueront à soutenir les oppresseurs. Vous devriez prendre note de ce qu'il a dit au Kenya, en ce qui concerne la politique basée sur les ethnies ……. Nous n'aurons pas une alternative forte aussi longtemps que nous continuerons à organiser notre combat politique en fonction de l'appartenance ethnique plutôt que de le fonder sur odes programmes politiques avec des partis capables de comprendre la géopolitique.

De nombreux intervenants commentant cette visite ont convenu que les Ethiopiens ne devaient pas attendre les Etats-Unis pour avoir un gouvernement démocratique dans leur pays. A eux de contrôler leur destin, a écrit Falmataa Lamii :

[…] C'est plus que suffisant pour nous que les USA compromettent la démocratie à cause de la sécurité !! Ils courent après leur sécurité nationale. Ils ne se soucient pas des innocents tués et emprisonnés par ces dictateurs ! Le monde occidental (États-Unis) aime toujours danser sur les cadavres des innocents et boire du sang innocent !!

Ne mendions, donc aux Etats-Unis de nous donner généreusement la démocratie !!! Le monde occidental (USA) et ses dirigeants (Obama) ne sont pas les pères de la démocratie. Mais celle-ci est le résultat du combat, de l'union des forces, de tout le peuple! L'effort commun de notre peuple uni est plus puissant que les pays occidentaux (USA) !

Faisons cela et nous obtiendrons cette démocratie que nous désirons !!!!

Pendant le discours de M. Obama à l'Union africaine, Adam a apprécié son soutien à la limitation du nombre des mandats présidentiels :

Grand discours, Monsieur le Président. Je souhaite que le Conseil de l'Union africaine adopte une nouvelle politique pour les gouvernants africains ou fasse la promotion d'un maximum de deux mandats pour tous présidents africains. Cela aidera à la croissance et à l'évolution du continent.

Pour un résumé de ce qui a transpiré de sa visite en Ethiopie, lisez ces faits saillants sur le blog Horn Affairs (Affaires de la Corne).

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