Taïwan : En mémoire de Chao-Jung Hsu, vétéran taïwanais de la Deuxième Guerre mondiale

Le 20 mai, il y a eu deux ans que mourait le vétéran taïwanais de la Deuxième Guerre mondiale Chao-Jung Hsu. Son destin tragique illustre l’histoire complexe de Taïwan, qui a subi la domination de différentes puissances coloniales le siècle dernier. Hsu est né à Taïwan le 13 novembre 1928 et s’est suicidé le 20 mai 2008 en signe de protestation politique. Il fut contraint de se battre au côté des colonisateurs de son pays d’origine, d’abord le Japon puis la République de Chine (Taïwan). Lorsqu’il fut enfin en capacité de faire des choix, il consacra sa vie à faire valoir les intérêts de ses compatriotes anciens combattants.

Taïwan fut une colonie du Japon durant la Deuxième Guerre mondiale ; Hsu fut alors enrôlé dans l’armée japonaise. Lorsque la République de Chine (Taïwan) revendiqua la souveraineté de l'ile après la Deuxième Guerre mondiale, la guerre civile chinoise éclata, et il rejoignit les rangs de l’armée républicaine pour combattre contre les troupes communistes de la Chine continentale. Il se retira à Taïwan lors la défaite des républicains. Il a eu de la chance, si on pense à tous les soldats qui ont trouvé la mort sur le champ de bataille.

Cependant, durant la période de Terreur blanche (1949-1987), Hsu fut poursuivi en justice par le Kuomintang, le parti nationaliste, et emprisonné pendant dix ans pour possession d’un livre sur le mouvement d’indépendance de Taïwan. Il fut relâché en 1968 et obtint le statut de réfugié politique en 1980. Il s’installa alors à Toronto, d’où il entama des recherches sur un de ses anciens compagnons de l’armée resté en Chine, grâce à l’Association Taiwanaise de Pékin. Hsu retourna à Taïwan en 1992 après que le gouvernement taïwanais eut aboli la « liste noire » des dissidents politiques, et dès lors, il consacra tout son temps à aider les anciens combattants taïwanais exilés à l’étranger. Il découvrit que nombre d’entre eux ont été abandonnés en Chine continentale par l’armée républicaine après la guerre civile chinoise. Certains d’entre eux ont été capturés par l’Armée populaire de libération (APL, communiste) et se sont battus pour cette armée lors de la guerre civile et plus tard lors de la Guerre de Corée.

Tous ces combattants étaient contraints de se battre pour les puissances qui les ont asservis, déplore michaelcarolina :

一代台灣青年,從一九三七年九月,台灣總督府強徵第一批軍夫「白襷隊」,…一直到一九五三年韓戰結束止;短短十六年間,台灣兵穿遍日本皇軍、國民黨軍,和人民解放軍的制服。

Ces jeunes soldats taïwanais qui ont été enrôlés dans l’armée japonaise en septembre 1937 (étaient sur le champ de bataille) jusqu’à la fin de la guerre de Corée en 1953. En 16 ans, ils ont porté successivement l’uniforme de l’armée japonaise, puis républicaine, et enfin de l‘APL.

Victimes directes de la guerre, beaucoup de ces soldats taïwanais expatriés ne pouvaient pas rentrer chez eux, à Taïwan, à cause des tensions entre les deux côtés du détroit de Taïwan. Hsu décida alors de lancer une campagne pour rapatrier les anciens combattants taïwanais de la  Deuxième Guerre mondiale.

當年(一九八九年)三月,許昭榮在北京發起「滯留大陸台籍老兵要回家」簽名運動,獨自一人拿著白布條,走過煙台、長山島、青島、上海、杭州、廈門,親訪這些滯留中國的老兵.

En mars 1989, il organisa une manifestation à Pékin ayant pour slogan « Les anciens combattants taïwanais veulent rentrer chez eux ». Il fit entendre ses revendications et se rendit dans villes de Yantai, Jangsando, Qingdao, Shanghai, Hanghzou, et Xiamen, pour rencontrer les vétérans qu’il connaissait.

Résultat, Hsu se rendit compte que la plupart des soldats expatriés en Chine et en Asie du Sud-est (enrôlés dans l’armée japonaise déployée dans l’Asie du Sud-est) vivaient dans des conditions très difficiles et misérables d’un point de vue politique, économique et psychologique. Ils furent abandonnés dans un pays étranger pendant la Deuxième Guerre mondiale, devinrent des exilés politiques et ne touchaient aucune pension, ni de la part des armées républicaines, ni de la part de l’armée japonaise, même s’ils avaient accompli leur devoir de soldat.

Afin de défendre les droits de ses anciens compagnons, Hsu organisa des conférences, des manifestations et se mit même en grève de la faim, pour finalement créer l’Association des anciens combattants taïwanais en 1994.

引起社會重視…政府也因此不得不正視。返鄉探親、定居,條件相繼放寬…國防部也同意將「陣亡台籍英靈」入祀台北圓山忠烈祠,並研擬撫恤事宜。

L’opinion publique a été sensibilisée… le gouvernement a finalement dû se conformer à nos exigences, et assouplir les restrictions faites aux vétérans taïwanais de Chine pour rentrer à Taïwan et s’y installer. Le ministère de la Défense a accepté d’ajouter une liste de « vétérans taïwanais » au Sanctuaire des Martyrs à Taipei et a accordé des pensions aux anciens combattants engagés dans l’armée républicaine durant la guerre civile chinoise.

Outre les compensations matérielles, Hsu ressentit la nécessité que le peuple taïwanais devait garder en mémoire l’histoire de la Deuxième Guerre mondiale en s’appuyant sur les histoires personnelles des soldats taïwanais. Il décida de faire construire un mémorial pour ses anciens compagnons.

一九九七年起,許昭榮與協會開始與一些地方政府接洽提供建碑用地,但始終未能如願。一九九八年六月廿八日起,許昭榮等人以接力絕食靜坐方式,終於獲得當 時高雄市長吳敦義的同意協助,最後因此取位於高雄旗津海岸約三千八百坪的國有公園用地,計劃興建紀念碑及公園。

À partir de 1997, Hsu commença à prendre contact avec plusieurs régions pour trouver un endroit où établir le mémorial. Il fut ignoré. Afin de susciter le soutien de l’opinion publique, Hsu et ses amis entamèrent une grève de la faim le 28 juin 1998 ; finalement, le maire de Kaohsiung, Mr Wu, accepta de leur attribuer un terrain (environ 12 562 m²) proche de Chi-Jin pour construire un mémorial et un parc.

由於沒有經費,紀念公園曾經有很長一段時間就這麼一直處在「計劃興建中」。…許昭榮再次向親友募款湊足卅二萬元,二○○六年十一月廿八日豎立一塊約廿噸重「戰爭與和平紀念公園」石碑…二○○七年下半年,中央撥下第二期工程經費,卻因高雄市議會的掣肘而動彈不得;最後,議會竟決議要將「戰爭與和平紀念公園」更名為「八二三砲戰紀念公園」。

Comme ils n’avaient pas assez d’argent pour construire le parc commémoratif, ce terrain a été « en travaux » pendant plusieurs années. Le 28 novembre 2006, Hsu parvint à rassembler 320 000 Nouveaux Dollars Taïwanais et construisit un mémorial en pierre « Guerre et Paix » (d’environ 20 tonnes)… Dans la seconde moitié de l’année 2007, le gouvernement central accepta la prise en charge financière de la seconde phase de construction, mais le financement fut bloqué par la municipalité de Kaohsiung. Finalement, la ville décida de changer le nom de « Parc Commémoratif de la Guerre et de la Paix » en « Bombardement de l’artillerie 823 ».

En signe de protestation contre la décision de la municipalité de Kaohsiung, Hsu s’immola par le feu le 20 mai 2008. Un an plus tard, le 20 mai 2009, le « Parc de la Guerre et de la Paix » fut inauguré. Vous pouvez voir ci-dessous une vidéo de l’inauguration :

L’Association des Vétérans Taiwanais qu’il a créée continue aujourd’hui de recueillir des témoignages d'anciens combattants taïwanais et aide ses concitoyens à comprendre l’histoire des soldats taïwanais lors de la Deuxième Guerre mondiale. Chaque année, le 20 mai, les gens se rassemblent au Parc de la Guerre et de la Paix en mémoire des anciens combattants taïwanais et de Chao-Jung Hsu.

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