Argentine : Nouvelles mesures de contrôle des devises

Le 31  octobre  2011, le gouvernement argentin a lancé une série de mesures pour contrôler la vente de devises étrangères. La mesure vise à freiner la tendance haussière du dollar nord-américain,  la Banque centrale argentine ayant dû, de fait,  diminuer ses réserves pour éviter les continuelles dévaluations du peso argentin face au dollar.

Cette mesure décidée entre la Banque centrale de l'Argentine et le  Ministère de l'économie est la première faisant suite à l'élection de l'actuelle Présidente, Cristina Fernandez de Kirchner, réélue avec 54% des suffrages.

Le blog Negocioaz parle de ces nouvelles mesures  :

Dès le début de la journée du lundi, le gouvernement argentin a commencé à appliquer un  contrôle drastique sur l'achat de monnaies étrangères, surtout de dollars américains. Bien qu'en Argentine il existe déjà un important contrôle du change, à partir d'aujourd'hui ,celui-ci s'est encore renforcé. En plus d'une pièce d'identité, des fiches de salaires, de l'avis d'imposition et d'une copie de factures à votre nom, s'ajoute maintenant l'obligation de demander à l'Administration  fédérale des impôts publics, via Internet, l'autorisation de pouvoir ou non acheter des devises étrangères.

Et il continue :

Il faut se rappeler que le gouvernement argentin a pris une série de mesures pour éviter la fuite des dollars et contrôler leur sortie. Le mercredi de la semaine passée, il a décidé que les compagnies pétrolières et  minières paieraient leurs exportations en devises dans le pays, rendant nulles les mesures fiscales spécifiques qui permettaient de disposer librement de 70% des devises obtenues par les exportations et provenant du pétrole ou des minerais.

Image de l'utilisateur de Flickr MoneyBlogNewz, utilisée sous la licence Attribution 2.0 Generic (CC BY 2.0)

A quoi doit-on cette histoire d'amour entre les Argentins et le dollar ? Le journal espagnol El País publie une note le 31 octobre en réponse à cette demande :

L'Argentine croît à un rythme qui est parmi les plus rapides d'Amérique latine, et ce, en dépit de la crise de la zone euro. La majorité de sa population soutient sa Présidente, Cristina Fernández de Kirchner, qui vient d'être réélue. Cependant, les entreprises, les banques et les citoyens qui ont un haut pouvoir d'achat n'ont pas confiance dans la monnaie argentine et ne cessent d'acheter des dollars, un refuge classique pour l'épargne en ce pays accoutumé aux dévaluations de manière  chronique.

Il poursuit :

Les Argentins qui achètent des dollars le font en raison de l'incertitude  quant à un éventuel impact de la crise de la zone euro, mais surtout parce qu'ils considèrent que le peso  surévalué après des années d'une inflation supérieure à  20% par an durant lesquelles la cotation de la monnaie nord-américaine a à peine augmenté.  La crainte d'une dévaluation du peso  – que le gouvernement de Fernández a écartée – s'est accrue ces deux derniers mois depuis la dépréciation du Real, auparavant surévalué.

Le blog de Abel commente la raison pour laquelle le citoyen argentin a toujours choisi le dollar comme monnaie d'épargne :

C'est une décision rationnelle car l'épargne en dollars, bien que ceux-ci puissent perdre de leur valeur, est accessible à n'importe quel moment. Épargner sous forme de terres, de propriétés, bien que ces dernières puissent gagner en valeur, revêt deux graves inconvénients : ce n'est pas à la portée des petits épargnants et on ne peut pas les  convertir en liquidités facilement. En matière d'actions, de placements fixes… nous, les Argentins, nous avons de mauvaises expériences et celles-ci auront du mal à s'effacer de notre mémoire.

Comment a donc fonctionné ce nouveau contrôle des changes mis en place lundi 31  octobre ? La page Prensa Hoy (Presse d'aujourd'hui) commente les problèmes survenus dans le système  mis en place entre l'AFIP (l'Administration fédérale des Impôts publics)  et les banques :

Ce lundi, on a enregistré de nombreux problèmes au moment d'acheter des devises, après la mise en place des nouvelles mesures de contrôle par le gouvernement national, qui obligent l'AFIP à confronter les données des clients avec celles de l'organisme avant de procéder à l'opération.

A cause d'une panne du système, presque personne n'a pu acheter de devises. Lorsque les acheteurs se sont précipités aux comptoirs, l'application qui recoupait les données s'est bloquée à cause d'un trop grand nombre de consultations simultanées.

Toutefois, après quelques jours, le mécanisme a mieux fonctionné. Le blog La Generación Siguiente (La génération suivante) fait ce commentaire :

Le mécanisme d'achat et de vente des devises fonctionne de mieux en mieux, ce qui a pu se vérifier par le faible pourcentage de rejets et par la réalisation d'opérations allant jusqu'à 500 000 dollars dans plusieurs bureaux de changes et de banques de la ville. S'il y a toujours des curieux qui visitent la base de données de l'AFIP , les consultations ont beaucoup baissé. Selon le service des impôts, le pourcentage d'opérations invalides est descendu à 1,6% tandis que pour les banques privées consultées le chiffre a avoisiné les 20%.

La mesure a affecté et affectera de nombreuses personnes dont on a évalué les revenus et les dépenses et qui seront autorisées ou non à acheter des devises étrangères.  La célèbre animatrice télé, Susana Giménez, a été l'une de ces personnes affectées. L'AFIP  l'a déclarée “à faibles revenus” quand elle a voulu acheter des dollars américains.

La demande de Susana Giménez, qui a été  impliquée dans l'achat de voitures de luxe avec une exonération pour personnes handicapées (des voitures cachées sous des balles de luzerne dans son ranch à  Pilar) et dans l'escroquerie à la Fondation  “Felices los Niños”, a été rejetée pour “faibles revenus”. La star a déclaré à l'AFIP un revenu annuel de 50 000 pesos –environ 3850 pesos par mois si l'on calcule les deux demi primes. Malgré cela, pour l'année en cours, elle a déjà acquis un volume de devises équivalent à 11 millions de pesos  (environ  2 600 000 dollars, aux taux de changes moyens).

Le contrôle s'effectue sur toutes les devises, mais rien n'est dit sur les autres opérations avec le Yen, l'Euro, le Real ou les autres devises.Pour l'heure, le dollar reste stable tout comme les réserves de la Banque centrale de l'Argentine, mais les Argentins se demandent toujours s'il faut investir ou acheter des dollars, comme le raconte Rafael Piránd sur son blog Argentina Salvajizada :

Je ne sais pas si ce dilemme est propre à tout gouvernement populiste  mais c'est celui de leurs victimes, en l'occurrence des Argentins. Investissement ou,  à l'image des hirondelles qui n'apprécient pas le froid et voyagent en quête de chaleur et de sécurité, fuite des capitaux vers l'étranger à la recherche précisément de cette sécurité ?

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