Italie, Tunisie : Paroles d'immigrés sur le Printemps arabe

Depuis janvier dernier, les événements en Afrique du Nord ont entrainé une série de changements qui font date, en termes de formes ou d'effets, pour la contestation au niveau mondial et la participation des citoyens.  Nous avons assisté à une restructuration profonde de la culture des manifestations traditionnelles et de l'activisme en ligne, même si, aujourd'hui,  le débat reste plus que jamais ouvert sur le rôle du Web 2.0 dans l'affrontement entre gouvernements et mouvements contestataires.

Le Moyen Orient et l'Afrique du Nord sont (et restent) un laboratoire passionnant pour les médias et la politique, qui a inspiré, entre d'autres nombreuses productions indépendantes, un documentaire en vidéo qui donne la parole directement aux Nord-Africains et aux Africains qui vivent en Italie. Intitulé #Revolution, la vidéo a été tournée dans les villes de Padoue et de Bologne par des citoyens reporters de l'association Voci Globali. Qu'ont signifié ces révolutions pour les immigrés ? Que pensent-ils du rôle d'Internet dans les résultats obtenus ? De ces interviews émergent des visions différentes : ceux qui considèrent la Toile comme le tremplin principal des succès, d'autres soutiennent au contraire que les réseaux sociaux ne peuvent se substituer à la rue.

Voici la vidéo intégrale [en italien ou sous-titrée en anglais, dérouler le menu pour choisir la version].

#Revolution sera projeté lundi 14 novembre à Padoue, à l'occasion de la conférence  “Tunisie, les saisons du jasmin” [en italien, comme tous les liens suivants, sauf mention contraire]. L'événement aura lieu dans le cadre de Immaginafrica, un festival important dédié aux cinémas africains, soutenu par le Département d'Histoire de l'université de Padoue. Le festival,  né en 2005, souhaite promouvoir la connaissance du continent africain dans toute sa complexité, pour :

En finir avec cette image trop souvent superficielle, appauvrie, stéréotypée et globalement négative qui, véhiculée par une logique d'assistance, entraine des difficultés nombreuses pour valoriser la position de l'interlocuteur ; cette image oriente de façon substantielle le rapport à l'immigration, alors que la reconnaissance du patrimoine intrinsèque aux différentes cultures, à  travers la connaissance attentive et informée des expressions culturelles qu'elles présentent – à laquelle les immigrés peuvent contribuer – peut devenir un appui valide à la construction d'un rapport réciproquement enrichissant.

Depuis ses débuts, les coordinateurs de ce festival ont mis en place de nombreuses initiatives dont la création d'une chaire universitaire sur le cinéma africain,  surtout francophone, avec une mise en relief du rôle fondateur du Burkina Faso. Cette spécialité est la première de son genre en Italie : outre les cours,  elle prévoit des échanges entre chercheurs italiens et burkinabé (comme par exemple le critique Justin Ouoro [français]) dans le cadre d'un projet de coopération entre l'université de Padoue et celle de Ouagadougou. Durant le festival de cette années sera projeté le film du lauréat de l'important Festival de cinéma du Burkina Faso, le Fespaco 2011 [français], “Pégase” [français], du Marocain Mohamed Mouftakir.

Immaginafrica 2011. Photo tirée du court métrage kenyan 'Pumzi'

Au programme de cette rencontre,  deux autres documentaires :  “Laïcité, inch'Allah!” [en français], tourné en Tunisie durant les journées du soulèvement et “I nostri anni migliori” (Nos meilleures années), tourné dans les camps de réfugiés de Mineo, Manduria et Palazzo San Gervasio en Italie. Une table ronde suivra, à laquelle participeront le jeune historien et cyberactiviste Mehdi Tekaya, le critique de cinéma Tahar Chickaoui [français] et Fethi Ouesleti, ouvrier tunisien immigré, qui apparait dans le documentaire cité plus haut. La table ronde sera modérée par la journaliste et blogueuse Gabriele Del Grande.

L'enthousiasme des jeunes “révolutionnaires du jasmin” pour le Printemps arabe se refroidira-t-il face aux résultats de l'élection constituante du 23 octobre dernier en Tunisie ?  La joie éprouvé lors des événements du début de cette années était palpable dans cet entretien radio avec Tahar Chikaoui, mis en ligne en janvier sur le site de Immaginafrica [pour ceux qui ne comprennent pas l'italien, l'émotion de la voix suffit à comprendre l'aspect historique des événements]. Les résultats de l'élection tunisienne du 23 octobre ont clarifié les limites de la Toile, son pouvoir d'innovation et la complexité des strates sociales tunisiennes. Le 27 octobre dernier, l'écrivain algérien Tahar Lamri publiait sur la page Facebook la traduction des paroles d'une  video [arabe] réalisée par le groupe Facebook 10 Millions de Politiciens [arabe et français] :

Les élections ne se gagnent pas sur Internet / Elles ne se gagnent pas si tu fais du tourisme dans les problèmes des gens / Elles ne se gagnent pas si dès que tu attrapes le micro, tu dis : populisme, élite, peuple ignorant, la laïcité est tout. / Parce que l'intellectuel connait Brecht, mais ignore tout du peuple / Les élections ne se gagnent pas avec des chansons. Les extraterrestres croyaient que la Tunisie était Mars, voilà pourquoi ils ont perdu.

Durant cette rencontre aura également lieu la présentation du livre électronique “70 chilometri dall'Italia” (A 70 kilomètres de l'Italie), publié par Voci Globali et également de Mehdi Tekaya. Après le succès rencontré par la première édition, sortie au printemps dernier chez quintadicopertina.com, le texte a été largement remanié et remis à jour pour y inclure l'élection constituante du 23 octobre dernier, avec des réactions et analyses recueillies après la publication des résultats définitifs.  L'e-book propose un large panorama historique et politique, avec une sélection  des billets les plus pertinents publiés sur Global Voices in Italiano ou sur les autres sites de Global Voices (ici, en français).

Pour les entretiens filmés qu'ils nous ont accordés, nous voulons remercier : Fabrice Dapnet, Mariange Sibi, Bacem Bjaoui, Tchouadeu Pouatcha Ulrich, Cheikh Ba, Hakim Jabrani, Zineb Naini, Souad Maddahi, Yassine Baradai, Diop Alioune Badara.

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